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Critique de Foxfire


J'ai beau tenir Steinbeck pour un immense auteur cela faisait bien longtemps que je n'en avais plus lu. Ma dernière lecture doit remonter à plus de 20 ans. Pour mes retrouvailles avec l'auteur j'ai choisi un roman un peu atypique dans sa carrière.
En effet, contrairement à la plupart des textes de Steinbeck, « lune noire » ne prend pas place dans l'Amérique rurale si bien dépeinte par l'auteur.

Un village de Scandinavie est occupé par les nazis qui veulent s'approprier le charbon produit ici. le roman va s'attacher à décrire cette occupation depuis l'entrée des nazis dans la ville. Les deux points de vue sont abordés. On voit l'évolution des sentiments des villageois, d'abord la stupeur de la plupart face à cette soudaine invasion, l'immédiate colère de certains et peu à peu la résistance qui s'organise. du côté allemand, les façons d'appréhender les événements sont nuancées. le Colonel Lanser est un personnage particulièrement intéressant. Il a déjà vécu une expérience similaire et sait donc les difficultés qu'un occupant rencontre. Il est très lucide sur la situation. Il sait comment tout ça va se terminer. Pourtant il fait le choix de continuer à appliquer les ordres. Il suit les procédures imposées alors même qu'il sait qu'elles vont précipiter leur échec. Il y a également le Commandant Hunter dont la connaissance théorique de la guerre n'a d'égale que son aveuglement face à la réalité de la situation. Et puis il y a les soldats bien sûr. Steinbeck pose sur eux un regard dénué de tout manichéisme. Ces jeunes gens qui ont cru les beaux discours, qui ont cru à l'idéal vendu par les nazis, ces jeunes gens un peu simples, qui se sont laissés endoctrinés, finissent par être presque émouvants. Si Steinbeck ne perd jamais de vue qu'ils sont l'envahisseur, il dépeint parfaitement leur détresse de jeunes gens ordinaires plongés, loin de chez eux, dans les souffrances de la guerre. A travers ces personnages, Steinbeck montre que l'idéologie nazie broie l'individu, l'homme allemand au même titre que les autres. L'homme allemand n'existe plus en tant qu'être, il n'est plus qu'un rouage de la machine. C'est ce souvenir d'humanité que le soldat Tonder viendra quémander pathétiquement auprès d'une jeune femme du village.

Le récit est parfaitement mené. On voit progressivement la peur changer de camp. le rapport de force s'inverse peu à peu. Même si l'histoire prend place pendant la seconde Guerre Mondiale, « lune noire » a une dimension vraiment universelle. Ce roman parle de toutes les guerres, de toutes les invasions. Et ce propos est très finement déployé. Cette subtilité est servie par l'écriture de Steinbeck que j'ai eu grand plaisir à retrouver après toutes ces années. Allant droit à l'essentiel, ne s'encombrant pas de fioritures inutiles, l'écriture a l'élégance de la simplicité.

« Lune noire » est un très bon roman, aussi subtil et intelligent qu'il est concis. Ce texte est une nouvelle fois l'occasion pour l'auteur d'exprimer son amour de l'Homme, malgré tout… J'ai beaucoup aimé ma lecture mais je crois que je préfère tout de même quand Steinbeck place ses écrits dans sa Californie natale.
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