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Critique de StCyr


Samedi 5 novembre 1831, Jérusalem, conté de Southampton, Virginie. Nat Turner, instigateur de la seule rébellion d'esclave concertée, coordonnée, de l'histoire de l'esclavage aux Etats-Unis, Spartacus de la cause noire, attend dans la froideur et l'humidité de sa prison, tiraillé par la faim, le jour qui va décidé de son sort, où des juges blancs vont sanctionner son oeuvre désespérée. C'est la confession d'écorché vif de ce révolté, que Styron a imaginé en ce basant sur un texte que dicta le fugitif à un tiers, parodie d'avocat, sur les témoignages de l'époque et pour le reste sur son imagination fertile.
Ce roman est le meilleur que j'ai lu, à ce jour, ayant trait à l'esclavage. A travers le destin de Turner, l'auteur rend vivante l'horrible condition que connurent des millions d'esclaves noirs dans les états du sud, dans une oeuvre coup de poing, sans concession et particulièrement atroce. Ce leader halluciné, mi-pasteur, mi-chef de bande, sorte de Jésus noir - charpentier et ayant des disciples -, fut victime et témoin de toutes les vexations, humiliations, tortures et sévices qu'infligeaient les blancs à ces esclaves qui n'avaient à leurs yeux de valeurs, qu'en fonction de leur force de travail, à peine plus que des boeufs, et dont les os mêmes servaient à fertiliser les sols… Et malgré cela, le livre rend vivant le manque de conscience collective de ces hommes, bien visible entre le fossé qui séparait les “gens de maison” et les noirs qui s'exténuaient dans les champs et les ateliers; à tel point que la grande majorité ce rangea du côté de leurs maîtres pour réprimer les quelques-uns qui osèrent suivre Turner, dans sa folle épopée de massacre. Cette oeuvre expose aussi toutes l'inanité des théories racistes qui avait court dans la population. le livre dresse aussi un tableau passionnant de cette terre de Virginie, appauvrie et rendue exsangue par la culture intensive du tabac et du coton. La filiation avec un autre, ô combien, grand écrivain, prénommé William lui aussi, Faulkner, est ici indéniable : mise en abîme, analepse, ambiance de violence dans une touffeur faite de sang et de sueur, racisme, recours obsédant à l'iconographie biblique.
Un récit poignant et dur, qui marque son lecteur, bien dans la veine de l'oeuvre de l'auteur du Choix de Sophie.
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