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Maurice Edgar Coindreau (Autre)
EAN : 9782070374250
544 pages
Gallimard (16/12/1982)
4.1/5   132 notes
Résumé :
S'inspirant de la révolte d'un groupe d'esclaves noirs qui, sous la conduite de Nat Turner, avait, en août 1831, jeté la terreur parmi les Blancs dans une région écartée du sud-est de la Virginie, William Styron, dans Les confessions de Nat Turner, fait œuvre à la fois d'historien, de sociologue, de peintre de mœurs et de psychologue, sans jamais oublier qu'il est avant tout romancier. Cela l'amène à prendre certaines libertés avec les faits, mais lui permet de bros... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Dangereux psychopathe ou héros de la lutte contre l'esclavage ? Chantre mystique ou fou illuminé ? La personnalité complexe de Nat Turner soulève de nombreuses questions et a notamment inspiré l'écrivain William Styron qui a publié "Les confessions de Nat Turner" en 1967.

Nat Turner est un esclave rebelle ayant réellement existé. C'est en 1831, alors âgé de 31 ans, que cet homme très pieux et très intelligent, esclave dans le comté de Southampton en Virginie, lance une véritable insurrection contre la domination des maîtres blancs à la suite de l'une de ses visions (hallucinations ?) mystiques. Pendant deux jours, à la tête d'une soixantaine d'hommes, il met à feu et à sang toute la région, tuant hommes, femmes et enfants blancs, faisant une soixantaine de victimes. Il s'agit du plus grand nombre de morts à se produire dans un soulèvement avant la guerre de sécession dans le sud des Etats-Unis. C'est finalement une milice deux fois plus puissante que la faction d'esclaves révoltés qui finit par mettre fin à ses agissements. Mais Nat Turner restera lui caché pendant deux mois avant d'être arrêté, jugé et pendu avec dix-huit de ses complices. Entre temps, sa révolte aura entraîné des dommages collatéraux puisque des centaines d'esclaves noirs, innocents, seront pendus en guise de représailles. Sa révolte aura également fait trembler d'effroi les populations blanches et entraîné un durcissement des lois esclavagistes.

Cet épisode historique sanglant et véridique ne pouvait qu'inspirer un écrivain (et plus récemment donner lieu à un film), d'autant plus que Nat Turner a pu livrer ses confessions avant son exécution à un avocat, Thomas R. Gray, dans la prison où il était détenu. C'est donc à partir d'une source historique que William Styron a rédigé son roman, y ajoutant bien entendu sa touche personnelle et soulevant au passage de nombreuses polémiques. Il fait ainsi de Nat Turner, ainsi que de ses comparses, des obsédés sexuels, n'hésitant pas à décrire une scène où l'esclave noir viole la maîtresse blanche, un mythe raciste souvent véhiculé et destiné à montrer le Noir comme un monstre pervers assoiffé de la chair des vierges blanches.

Ce qu'il me reste pour ma part de ce roman est l'image d'un personnage extrêmement intelligent, fourbe et violent. L'image aussi d'une épopée mystique et sanguinaire, révélant au demeurant une société blanche cruelle et corrompue. "Les Confessions de Nat Turner" est un roman brutal et perturbant. On ne sait ce qui nous choque le plus, la violence des rebelles assoiffés de sang, de haine et de sexe ou la veulerie et la bassesse des Blancs.

Nat Turner demeurera sûrement insaisissable à jamais.
Un grand livre, à l'image de son auteur.
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Le récit que nous livre William Styron à travers son roman, est une fiction brûlante à plus d'un titre. Tout d'abord parce qu'elle relate l'histoire de l'unique révolte d'esclaves qui ait eu lieu aux États-Unis, une trentaine d'années avant que le Congrès ne vote le XIIIème amendement à la constitution qui en établit l'abolition. Elle présente par ailleurs l'originalité de s'appuyer sur un texte que Thomas Ruffin Gray, avocat de Nat Turner, principal instigateur de l'insurrection, aurait rédigé à partir de ses propos, recueillis en prison avant qu'il ne soit exécuté par pendaison. Ainsi recèle-t-elle une force hors du commun par ce qu'elle dit mais plus encore par ce qu'elle ne dit pas, donnant toute liberté au lecteur d'interroger le monde d'aujourd'hui à la lumière de ce qu'il fut hier. Ces journées d'août 1831, qui firent 55 victimes blanches dans le comté de Southampton en Virginie, s'inscrivent dans ces temps modernes d'après la découverte de l'Amérique, lorsque 12 millions d'esclaves furent réduits à l'état de marchandise et transformés en outils, cantonnés dans une infériorité systémique et privés de toute identité. Ainsi en est-il du personnage principal du roman, il grandit à Turner's Mill, et comme la maison, il porte le nom de son propriétaire, seul son prénom Nathaniel, le rattache au souvenir du père, qui choisira de fuir et qu'il ne connaîtra pas. le livre raconte comment la société esclavagiste repose toute entière sur une haine ordinaire, une haine qui ne dit pas son nom mais s'inscrit dans la relégation, en marge d'un monde blanc inaccessible. Dans cette marge-là, Nat Turner qui sait lire et écrire, qui connaît la Bible et figure parmi les esclaves qui vivent au plus près du quotidien des maîtres, se saisit de cette haine en boomerang. Elle est son unique étendard, elle inscrit son insurrection dans une impasse sanglante, qui ne fera pas bien sûr, frémir l'ordre social, y compris au-delà de l'abolition de l'esclavage. On se rappellera de ce drapeau confédéré, brandit le mercredi 06 janvier dans les murs du Capitole.
J'ai relu avec intérêt l'une des nouvelles écrites par John Edgar Wideman qui a publié récemment « Mémoires d'Amérique », elle s'appelle « Nat Turner se confesse »
J'en citerai en conclusion un extrait, Wideman fait dire à Nat Turner :
« Les blancs ne changent pas. Refusent de changer. Alors ils t'ont changé toi. T'ont modelé-plié, tordu, évidé-Pour que tu sois qui tu es. Es-tu celui que tu souhaites être, ou celui que les blancs souhaitent que tu sois. Tu fais partie de leur plan Nat Turner. Mais pas partie d'eux, Nat Turner, eux, ils font partie de toi. Retire-les. Retire-toi de leur plan. » (p191)
Ce roman de William Styron aide à prendre la mesure, de ce que la haine a laissé de traces dans la société américaine, de ce qu'elle a laissé de traces partout dans le monde bien après que les empires coloniaux soient tombés.
Guérir de l'esclavage, une longue route pour l'humanité.
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The Confessions of Nat Turner
Traduction : Maurice-Edgar Coindreau

De format beaucoup plus modeste que "Le Choix de Sophie", "Les Confessions de Nat Turner" suscita la polémique parce que Styron s'était refusé à occulter le côté "illuminé religieux" de son héros. Pour les bien-pensants, Turner devait être exclusivement un révolté social, le premier qui brava la Mort pour dénoncer le statut des esclaves noirs dans le Sud des Etats-Unis. le personnage devait s'arrêter là et c'est sur cette réputation tronquée que l'on devait lui tisser des lauriers.

D'emblée, Styron refusa le mensonge et s'attaqua à restituer Nat Turner tel qu'il fut - ou, en tous cas, tel qu'il parvint à le reconstituer au gré des témoignages.
Enfant précoce, fils d'un Noir évadé et d'une domestique si bien intégrée à la famille blanche qui l'avait élevée qu'elle fut enterrée dans son cimetière, Nathanael Turner savait lire dès quatre ans. L'entourage de son maître, Samuel Turner, l'y avait grandement encouragé car Samuel croyait que, tôt ou tard, il faudrait bien éduquer les esclaves et réviser leur sort. Ce que n'avait malheureusement pas prévu ce Blanc que Nat évoque toujours avec un curieux mélange de tendresse et de mépris, c'est que sa fortune diminuerait tellement qu'il lui faudrait vendre ses possessions.
Ce fut ainsi que Nat se retrouva simple marchandise dans les mains d'un pasteur homosexuel puis, de hasard en hasard, entre celles d'un fermier redneck - c'est-à-dire l'un de ces "pauvres Blancs" dont parle Margaret Mitchell dans "Autant en emporte le vent" - la plus basse caste blanche dans le Sud esclavagiste.
Elevé dans la certitude qu'un jour, il ferait quelque chose de grand - et si Samuel Turner avait pu le conserver, il est vraisemblable que Nat aurait été affranchi un jour ou l'autre, avec un métier dans les mains - notre héros, qui est fier, est ramené à la réalité sordide, cruelle, injuste de l'esclavage, que Styron décrit sans aucune complaisance. Pour le soutenir, un seul viatique : la prière. Avec la lecture, Mrs Turner avait aussi enseigné au petit Nat la Bible et les chants religieux.
Sorti de la prière et de la méditation, Nat n'a rien. Pire : à ses propres yeux, il n'est rien. Sa sexualité, assez trouble, partagée entre un attrait naturel pour l'homosexualité et le désir (plus conventionnel) des femmes blanches que lui inspire la conscience de sa condition, ne s'exprime que de façon très minimale. Et, comme de juste, cette retenue de l'instinct en fait un orateur très recherché qui, peu à peu, va prêcher la colère divine s'abattant sur les Blancs.
Styron a choisi la première personne pour rédiger ces "Confessions ..." Grâce à une écriture particulièrement intelligente et sensible, il parvient à mettre à jour les contradictions dont est tissé le caractère de son personnage principal - comme d'ailleurs celui de la majorité des hommes. Nat, par exemple, admettra de bonne grâce avoir ordonné le massacre de personnes qu'il n'avait aucune raison de détester et qui, même, avaient fait preuve de bonté envers lui. Il déclare lui-même à son avocat être dans l'impossibilité d'expliquer le phénomène autrement que par la volonté de Dieu.
Mais Styron fait mieux : il rend le lecteur solidaire de Nat (notamment quand il évoque les conditions de l'esclavage, les pratiques de certains Blancs et Noirs, etc ...) tout en le contraignant à le désapprouver dans son délire mystique. Pour un agnostique - blanc ou noir d'ailleurs - le propos est d'ailleurs très clair : Nat Turner le Noir a été contaminé par l'idéologie religieuse biblique. D'autres, qui n'étaient ni esclaves, ni considérés comme moins que rien, se sont laissés prendre à ces redoutables sirènes. N'est-il pas normal dans ces conditions que Nat, dont l'intelligence ne fait aucun doute mais que la "rupture" forcée avec cette image paternelle que représentait pour lui Samuel Turner et plus encore les conditions dans lesquelles elle survint ont forcément fragilisé à outrance, ait sombré lui aussi ? ...
Roman subtil, roman dérangeant à plus d'un titre, "Les Confessions de Nat Turner" rappelle que, bien avant la guerre de Sécession, le Sud se divisait entre partisans de l'esclavage et adeptes d'un retour à la liberté pour les Noirs. Il démontre aussi combien ces deux visions, si dissemblables qu'elles fussent, étaient aussi utopiques l'une que l'autre. Les songeries de Nat Turner, ces pensées qui tournent en vase clos, se heurtent aussi bien à l'une qu'à l'autre. A sa manière, Nat aura cherché une troisième voie - qui s'ouvre sur la Mort, la sienne et celle de parfaits innocents. Peut-être en existe-t-il une autre mais le Sud - et l'Humanité à travers lui - finira-t-il par la découvrir ? Styron en doute - et son lecteur aussi. Mais il a le mérite de prouver une fois encore que, Blanc ou Noir, l'Homme est assailli par les mêmes démons. ;o)
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Toujours controversé 45 ans après sa parution, la mise en fiction de la révolte d'esclaves de 1831.

Publié en 1967, le quatrième roman de William Styron, couronné par le prix Pulitzer cette année-là, et son plus grand succès populaire avec "Le choix de Sophie", reste son plus controversé.

Le compte-rendu fictionnel détaillé de la genèse et du déroulement de la (vraie) révolte d'esclaves de 1831 en Virginie, sous la forme d'une "confession" authentiquement recueillie auprès de son instigateur, Nat Turner, emprisonné en attendant la pendaison, déchaîna à l'époque de sa parution les charges "des deux côtés", malgré le soutien sans faille de James Baldwin et de Ralph Ellison, une grande partie de la critique afro-américaine en dénonçant les stéréotypes racistes que le roman véhiculerait, tandis que la critique conservatrice conspuait la noirceur de la description des esclavagistes, comme de la corruption et de la veulerie immondes d'une large proportion du clergé.

Si l'on peut en effet discuter à l'envi des effets secondaires potentiels de certains choix narratifs de Styron (les obsessions sexuelles d'une petite partie des révoltés, notamment), il reste quoi qu'il en soit, l'effrayant portrait intime d'un esclave instruit, à la limite même du surdoué, connaissant par coeur sa Bible et pouvant la citer en permanence avec une parfaite exactitude, concoctant au fil des années, dans la haine et le ressentiment vis-à-vis de son oppresseur générique (et non particulier), une insurrection violente, entraînant l'assassinat de 55 Blancs (y compris femmes et enfants), la condamnation à mort de 40 Noirs révoltés (sur les 70 identifiés), et le lynchage sauvage par les milices des planteurs effrayés et vengeurs de 300 Noirs n'ayant rien à voir avec le mouvement... et la peinture à l'acide d'une société entièrement orientée vers le profit, petit ou grand, masquée dans ses oripeaux religieux, méthodistes ou autres, fustigeant la générosité dangereuse des abolitionnistes quakers, et résolument aveugle à sa propre corruption fondamentale.

Un grand livre, terriblement brutal, dont Tarantino se souvient bien entendu avec jubilation au moment de préparer son "Django Unchained", et qui illustre parfaitement la citation de Flaubert que Styron fit figurer pendant quarante ans au-dessus de la porte de son bureau : "Soyez réglé dans votre vie et ordinaire comme un bourgeois, afin d'être violent et original dans vos oeuvres".
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Samedi 5 novembre 1831, Jérusalem, conté de Southampton, Virginie. Nat Turner, instigateur de la seule rébellion d'esclave concertée, coordonnée, de l'histoire de l'esclavage aux Etats-Unis, Spartacus de la cause noire, attend dans la froideur et l'humidité de sa prison, tiraillé par la faim, le jour qui va décidé de son sort, où des juges blancs vont sanctionner son oeuvre désespérée. C'est la confession d'écorché vif de ce révolté, que Styron a imaginé en ce basant sur un texte que dicta le fugitif à un tiers, parodie d'avocat, sur les témoignages de l'époque et pour le reste sur son imagination fertile.
Ce roman est le meilleur que j'ai lu, à ce jour, ayant trait à l'esclavage. A travers le destin de Turner, l'auteur rend vivante l'horrible condition que connurent des millions d'esclaves noirs dans les états du sud, dans une oeuvre coup de poing, sans concession et particulièrement atroce. Ce leader halluciné, mi-pasteur, mi-chef de bande, sorte de Jésus noir - charpentier et ayant des disciples -, fut victime et témoin de toutes les vexations, humiliations, tortures et sévices qu'infligeaient les blancs à ces esclaves qui n'avaient à leurs yeux de valeurs, qu'en fonction de leur force de travail, à peine plus que des boeufs, et dont les os mêmes servaient à fertiliser les sols… Et malgré cela, le livre rend vivant le manque de conscience collective de ces hommes, bien visible entre le fossé qui séparait les “gens de maison” et les noirs qui s'exténuaient dans les champs et les ateliers; à tel point que la grande majorité ce rangea du côté de leurs maîtres pour réprimer les quelques-uns qui osèrent suivre Turner, dans sa folle épopée de massacre. Cette oeuvre expose aussi toutes l'inanité des théories racistes qui avait court dans la population. le livre dresse aussi un tableau passionnant de cette terre de Virginie, appauvrie et rendue exsangue par la culture intensive du tabac et du coton. La filiation avec un autre, ô combien, grand écrivain, prénommé William lui aussi, Faulkner, est ici indéniable : mise en abîme, analepse, ambiance de violence dans une touffeur faite de sang et de sueur, racisme, recours obsédant à l'iconographie biblique.
Un récit poignant et dur, qui marque son lecteur, bien dans la veine de l'oeuvre de l'auteur du Choix de Sophie.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
- Oui,j'ai dû vendre ces quatre garçons parce que j'avais besoin d'argent....
...Je les ai vendus par désespoir, pour pouvoir me cramponner ici, sans but, quelques années encore. - Il fit un geste brusque avec son bras levé et il sembla passer la main sur ses yeux d'un rapide mouvement de colère. - Sûrement que l'humanité n'est pas encore née.
.... Comment pourrait-on expliquer autrement une cruauté aussi boiteuse, aussi gauche, aussi haïssable ? Même les sarigues et les mouffettes sont supérieures à nous ! Même les belettes et les mulots ont un respect instinctif pour les autres bêtes de leur espèce et de leur sang. Il n'y a que les insectes qui soient assez bas pour pour faire les bassesses que font les hommes - comme ces fourmis qui grouillent sous les tulipiers en été et entretiennent goulûment des petits pucerons verts à cause de la miellure qu'ils distillent. Oui, c'est bien possible que l'humanité ne soit pas encore née. Ah, que de larmes amères le Seigneur doit répandre quand il voit ce que les hommes font aux autres hommes! -
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Jamais, depuis le jour où j'avais été vendu pour la première fois, je n'avais ressenti une rage aussi grande, une rage intolérable, une rage qui me rappelait la fureur d'Isham quand il hurlait des insultes à Moore, une rage qui était le point culminant de toutes les angoisses réprimées, de toutes les frustrations qui grandissaient en moi depuis ce temps lointain, dans mon enfance, où des conversations de véranda m'avaient appris que j’étais un esclave, et un esclave pour toujours. Mon coeur, comme je l'ai dit, se rétrécissait, mourait, disparaissait en moi et, pour combler ce vide ma rage, comme un nouveau-né se mettait à hurler. C'est à ce moment là que j'ai compris sans le moindre doute, sans la moindre conscience du danger que - quel que soit l'endroit, quel que soit le moment, quelle que soit la douce jeune fille cueillant innocemment des fleurs sous une charmille, ou la dame penchée sur son tricot dans la fraîcheur d'un salon de campagne, ou l'innocent jeune homme contemplant, assis, les murs couverts de toiles d'araignée dans les cabinets au bout de son jardin d'été - le monde entier des Blancs s'effondrerait un jour, tomberait en morceaux, victime de ma vengeance, périrait de mes mains et selon mes plans. J'eus un haut- le- coeur et dus faire un effort pour ne pas vomir sur les planches où j'étais assis.
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Hark avait un flair pour tout ce qui est étrange, biscornu : s'il avait pu lire et écrire, s'il avait été blanc et libre, et s'il avait vécu dans ces temps élyséens, alors qu'il n'était qu'une propriété négociable d'une valeur de six cents dollars quand le marché était en baisse, il aurait pu devenir homme de loi. J'avais été profondément déçu de constater que son instruction religieuse (qu'il me devait principalement) avait à peine laissé une trace dans son esprit, de sorte que, libre de toute retenue, de tout lien spirituel, il réagissait au côté ridicule de la vie et pouvait rire tout son content, amusé par les nouvelles absurdités de chaque jour. En somme, il avait une attirance vers ce qui était fou, inattendu : et, en fin de compte, cela me rendait légèrement envieux.
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Je me rappelle que, plus tard, ce jour-là, quand Moore vint me chercher au marché pour me ramener à la ferme dans la charrette entre les champs d'été jaunâtres et desséchés, j'étais plein de sombres sentiments que je n'arrivais pas à chasser, profondément troublé par le fait que ce n'était pas les insultes, le mépris ni même l'indifférence d'une personne blanche qui pouvaient allumer en moi cette haine meurtrière, mais sa pitié, peut-être même le plus tendre élan de sa charité.
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Car le Prédicateur avait raison : Celui qui augmente ses connaissances augmente également ses chagrins. Et Samuel Turner (que j'appellerai dorénavant Marse Samuel car c'est sous ce nom que je le connaissais) ne pouvait pas deviner, dans son innocence, sa décence, sa terrifiante bonté et la tendresse de son coeur, de quels chagrins il se rendait responsable en me nourrissant de cette demi-mesure de connaissances : pas de mesure du tout aurait été bien préférable.
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Joseph a douze ans lorsquil découvre dans son village de Géorgie le corps dune fillette assassinée. Une des premières victimes dune longue série de crimes. Des années plus tard, alors que laffaire semble enfin élucidée, Joseph sinstalle à New York. Mais, de nouveau, les meurtres denfants se multiplient Pour exorciser ses démons, Joseph part à la recherche de ce tueur qui le hante. Avec ce récit crépusculaire à la noirceur absolue, RJ Ellory évoque autant William Styron que Truman Capote, par la puissance de son écriture et la complexité des émotions quil met en jeu.
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