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Critique de mfgaultier


Avec la Patrouille des invisibles, Olivier Supiot signe un album consacré à des hommes engagés corps et âmes dans la grande guerre. Construit en quatre chapitres, cet album nous immerge dans cette tragédie totale, dans les airs d'abord puis sur terre, en suivant les péripéties d'une escouade maudite.

Le premier chapitre, intitulé « la chute de l'ange » nous entraîne sur les traces d'Hubert Lessac, un talentueux aviateur aux 19 victoires, devenu par ses loopings meurtriers un »héros pour toute la nation« . Revers de la médaille, il est victime de son succès en étant le « jouet de la propagande« . Mais le pire est à venir : à la suite d'une terrible nouvelle, Hubert ne souhaite rien d'autre que la mort, lui qui n'a cessé de jouer avec durant ses heures de vol. En croisant deux fokkers (avions allemands), il récite le Notre père et son avion s'écrase…

Chapitre deux, la silhouette de la couverture nous fait face cette fois-ci. La BD prend alors un tournant : elle s'éloigne de l'histoire d'amour pour se tourner résolument vers l'horreur monumentale des champs de bataille, pleine « de sang et de boue« . Hubert est secouru par deux poilus et introduit au sein de la patrouille des invisibles, constituée d'être étonnants au « dérisoire destin« . L'eux d'eux, Titouan Kerzadec, « une montagne de près de 120 kilos« , ressort clairement du lot :

Avec Kerzadec, surnommé « Titan », Supiot dessine un personnage sombre, un impressionnant « pourvoyeur de mort » presque invisible aux yeux de ses ennemis : c'est l'inquiétante silhouette qui illustre la couverture. Titan m'a fait penser au très bel album Paco les mains rouges de Vehlmann et Sagot.

Chapitre trois : la patrouille des invisibles part rejoindre le reste de sa troupe, quelque part « dans les ténèbres » et le dernier chapitre, intitulé « cauchemar« , va nous révéler le triste sort de cette poignée d'hommes.

Cette BD impressionne par la force des dessins dont certains nous explosent à la gueule comme les obus de cette guerre sur les champs de bataille. Par l'intermédiaire du jeune aviateur couvert de gloire, le lecteur va suivre des trajectoires plus anonymes, frappées de plein fouet par l'absurdité de cette guerre.

Au cours de ma lecture, j'ai été surprise par les partis pris de l'auteur : j'ai regretté, en petite midinette que je suis, d'être stoppée dans cet élan prometteur du premier chapitre. Et quelques péripéties m'ont semblé un poil arrangées, voire alambiquées, au profit de la guerre dévoreuse de chair humaine qui demeure le fil directeur de tout l'album. En fait, j'ai eu l'impression que l'album passe en revue toute une galerie de personnages sans vraiment approfondir leur trajectoire, ce qui donne plusieurs parcours qui, s'ils sont liés indubitablement, partent dans plusieurs directions. Je n'ai pas eu le temps de vraiment m'attacher à un seul de ces personnages et cela m'a gênée. Peut-être que cette patrouille des invisibles aurait mérité un second tome ? Ce qui aurait permis de davantage creuser l'histoire de chacun de ces personnages hauts en couleurs. Ceci dit la fin reste ouverte, une suite peut se profiler à l'horizon…

Les dessins d'Olivier Supiot sont très soignés, à l'image de ces croquis surprenants de gueules cassées. le travail sur les couleurs est impressionnant : du rouge pour évoquer la mort qui rôde mais qui renvoit aussi à la passion amoureuse. Des ciels bleus magnifiques comme écrins aux batailles d'avions. Et des couleurs plus sombres pour les tranchées, quoique sa palette soit plutôt généreuse (et moins manichéenne que mon propos le suggère !). Bref, pas mal de planches spendides ! (vous pouvez lire le début de l'album sur le site de Glénat). A mentionner, un cahier graphique qui nous fait partager le travail très méticuleux de Supiot, mais qui est un peu court à mon goût (le cahier pas le travail !). Des dessins très expressifs qui évoquent la peinture, à de nombreuses reprises.

Un travail tout en finesse pour évoquer les atrocités de la grande guerre. Un album qui permet de se remémorer la cruauté de ces années, au plus près de simples soldats qui essaient de sauver leur peau.
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