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Critique de Lamifranz


Des ACI (auteurs-compositeurs-interprètes) du sexe féminin, bref des autrices-compositrices-interprètes, ou encore auteures-compositeures-interprètes, dans les années 60, il n'y en avait pas des tas, en cherchant bien on pouvait trouver : Mireille (celle qui couchait dans le foin, pas celle qui élevait mille colombes), pas tout à fait une première main, mais une grande petite dame ; quelques valeurs sûres qui sont aujourd'hui au Panthéon de la chanson française : Barbara, Anne Sylvestre, Colette Magny ; et les petites jeunes prometteuses : Françoise Hardy et Anne Vanderlove. Les décennies suivantes ont vu les femmes s'imposer peu à peu, jusqu'à nos jours où elles font jeu égal (sinon mieux) avec les garçons.
Anne Sylvestre est une toute grande, digne (comme Barbara) de figurer aux côtés des Brassens, Brel, Trenet, Ferré, Ferrat, Béart et autres grands représentants de la chanson, mais aussi de la poésie, et je ne parle pas de l'engagement profond pour certaines valeurs, quelque peu passées de mode aujourd'hui.
Née en 1934 à Lyon, décédée en 2020 à Paris, Anne-Marie-Thérèse Beugras (qui deviendra Anne Sylvestre) grandit avec sa soeur (la romancière Marie Chaix) dans l'ombre d'un père collabo notoire. Elle aura du mal à se défaire de ce lourd héritage. Très tôt elle écrit des textes d'une apparente facilité (en réalité fruits d'un véritable travail), pleins de simplicité et de poésie, qui évoquent de façon très sensible la nature, l'eau, le vent, ainsi que les sentiments humains, en particulier, l'amour, ses joies et ses peines. Très tôt aussi elle dit ses convictions : elle est féministe, milite pour une égalité de droits, se bat contre toutes les différences, sexistes, racistes, homophobes, et prend position dans plusieurs grands combats : le viol, l'avortement, la misère, l'abandon. Indépendamment de ce répertoire « pour adultes », elle écrit aussi pour les enfants plusieurs séries de « Fabulettes », petits trésors de poésie, de fantaisie et de fraîcheur qui font encore aujourd'hui le bonheur de nos chères têtes blondes (et de leurs parents).
Estimée, voire admirée par beaucoup d'artistes (au premier rang desquels Georges Brassens et Boby Lapointe) Anne Sylvestre (surnommée au début « la Brassens en jupons ») a fait école. Beaucoup de jeunes chanteurs et de jeunes chanteuses se réclament d'elle, de son inspiration poétique et réaliste en même temps, et aussi de son engagement absolu pour des causes majeures…
Au total que retiendrons-nous d'Anne Sylvestre ? La qualité de ses textes, celle de ses mélodies, celle de son interprétation ? Certes, c'est l'évidence même, j'y ajouterai une chose, qui est la marque des plus grands artistes (et que tous n'ont pas, même chez les plus grands), c'est l'humilité. Si Anne Sylvestre reste, même après sa mort, aussi populaire, c'est sans doute à cause de toutes les qualités qui ont été évoquées, mais c'est aussi que, malgré le succès, elle est quelqu'un qui est toujours « resté à sa place » et sa place, dans sa vie comme dans ses chansons, elle est auprès des gens, je dirais même des petites gens, en tous cas des gens à problèmes, des gens à qui il faut tendre la main... Anne Sylvestre n'est pas seulement une Grande Dame de la chanson, elle est une Grande Dame, tout court.
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