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Critique de alouett


Nous sommes en 1957 dans la province de Wakayama.

Après avoir fait des études secondaires, un jeune homme de 20 ans décide de devenir charbonnier comme son père. Il s'installe donc à son compte, achète des droits d'exploitation de parcelles de forêt et consacre son temps à l'entretien de son four et la coupe de bois. Un quotidien de solitude propice à la rêverie et à la nostalgie.

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Ce manga est l'adaptation du roman éponyme de Ue Toshikatsu, écrivain, charbonnier et fils de charbonnier. le Conte du charbonnier est son autobiographie.

En choisissant d'adapter cette oeuvre, Shigeyasu Takeno signe, à cinquante ans, son premier manga publié. Mangaka depuis déjà plusieurs années, on remarque rapidement la technicité de l'auteur. La lecture est fluide, le lecteur dispose d'une bonne perception des mouvements, le cadrage des visuels est agréable, l'oeil est guidé dans sa découverte des planches. Ce manga de 238 pages se découpe en 11 chapitres qui traitent, à différents niveaux, du quotidien d'un charbonnier. L'histoire se clôt sur une postface de Patrick Honnoré, traducteur du Conte du Charbonnier et Directeur de la Collection « Manga » de Picquier. Même si je salue la richesse de ce texte, j'ai trouvé dommageable qu'il soit inséré en fin d'album ; il apporte en effet de nombreux éléments quant aux conditions de réalisation de l'album et offre des éléments de compréhension quant à la construction du récit… des détails qui m'auraient certainement permis d'apprécier cet album. On y apprend notamment que :

"Dans le conte du charbonnier, la sortie du four est présentée avant le chargement et se termine par la fabrication du four, là où peut-être un récit occidental aurait choisit le déroulement encyclopédique inverse. Dans ce choix de placer au centre non pas l'homme maître des éléments, orgueilleux démiurge, mais la nature elle-même, se perçoit la relation spécifiquement asiatique de l'homme à la technologie et à la production".

Patrick Honnoré va jusqu'à mettre en parallèle les travaux de Shigeyasu Takeno et de Jiro Taniguchi quant au réalisme des visuels. Il est vrai que la qualité des dessins de Takeno est agréable pourtant, elle n'égale pas celle de l'auteur du Journal de mon père (ou d'autres récits qui ont d'ores et déjà conquis de nombreux lecteurs). Mais force est de constater que l'ambiance graphique de ce manga diffuse beaucoup de sérénité et permet au lecteur de contempler de magnifiques décors boisés et montagneux. En revanche, pour la partie des visages, le travail de Takeno est inégal. le personnage principal est affublé d'un visage assez lisse qui transmet mal l'état d'esprit du personnage. En général, il semble naïvement content de sa condition, affublé en permanence d'un sourire satisfait d'un regard ébahi. Quant aux personnages secondaires, même constat : quelques faciès très expressifs se démarquent comme ceux des vieilles femmes ridées à souhait et conférant à ces héroïnes une part de mystère et de charisme.

Au niveau du scénario en revanche, j'ai trouvé cette lecture ennuyeuse. On ne sort pas du quotidien de ce jeune homme et de ses tâches répétitives : s'occuper du four, couper du bois, contempler la faune et la flore, plonger dans ses souvenirs d'enfance, s'ébahir d'un battement d'ailes, d'un bruissement de broussaille ou d'un flocon de neige. On apprend beaucoup sur le métier de charbonnier mais, à la différence de Taniguchi qui sait passionner son lecteur, j'ai trouvé que Takeno avait tendance à l'ennuyer. le personnage transmet son savoir mais en tire-t-il une quelconque expérience ?? Des digressions narratives nous emmènent régulièrement explorer les habitudes (alimentaires, défensives…) du chamois ou du pic-vert… même constat : c'est intéressant, un peu pompeux et, en revanche, ces passages diluent l'intrigue principale, si tant est que l'on puisse dire qu'il y a intrigue. Seul point positif : les us et coutumes nippones sont très présentes. A mesure qu'on avance dans la lecture, l'auteur consacre une belle place au folklore japonais en faisant exister les yokais, ces petits êtres mi-anges mi-démons. Ne vous attendez cependant pas à revivre la magie que Shigeru Mizuki avait su créer dans des oeuvres comme NonNonBâ ou Kitaro le Repoussant.

En conclusion, on évolue dans de belles ambiances graphiques mais la présence de ce personnage qui oscille entre présent et souvenirs, un homme sans ambitions, sans projet d'avenir, crée rapidement de la lassitude dans la lecture. Il se contente de petits moments de bonheur volés, d'une goutte de rosée ou d'avoir su produire un charbon de qualité… je trouve cela un peu léger. L'ouvrage se construit, comme de nombreuses oeuvres japonaises, autour de la recherche d'harmonie entre l'homme et la nature et de la fierté du travail bien fait. On est dans un récit contemplatif qui n'a pas su me charmer, un conte qui ne m'a pas émerveillée.
Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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