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Critique de elea2020


Christiane Taubira nous livre ici un "récit littéraire" certes autobiographique, mais surtout magnifié par son exigence d'écriture, parfois même un peu difficile à suivre. Elle use d'une telle précision de vocabulaire dans la description de la nuit d'origine, durant l'enfance en Guyane, que j'ai envisagé de faire des listes pour jouer aux animaux ou règne végétal de A à Z...

Chaque chapitre relate une nuit particulière dans sa vie de femme, et surtout bien sûr, de femme politique. J'admirais déjà la Ministre de la Justice et garde des Sceaux, celle qui a impulsé et porté des lois importantes, comme celle sur la reconnaissance de l'esclavage, ou celle du mariage des couples homosexuels. Ici, j'ai découvert une femme de conviction, une femme plus que cultivée, vraiment érudite, mais aussi une femme qui a eu le courage de ses convictions. Ainsi, une nuit elle marche dans les broussailles pour retrouver, le temps d'un éclair, son mari, militant indépendantiste recherché, en portant son fils contre elle. C'est dangereux, elle est surveillée, mais elle marche, à l'écoute des bruits qui pourraient l'alerter.

Elle raconte encore une nuit sur le fleuve Maroni, en Guyane, alors qu'elle descend par un train de bateaux pour tester un convoi scolaire. Elle combat les aberrations administratives : les enfants peuvent aller à l'école en bateau, mais comme les fleuves ne sont légalement pas navigables, les compagnies d'assurance n'assurent pas. Elle raconte aussi les nuits à l'Assemblée Nationale, lorsqu'elle a défendu la loi pour le mariage des homosexuels, alors qu'elle était vilipendée, même menacée. Ou encore la nuit du Bataclan, la réaction rapide des médecins pour évacuer les blessés... Parfois, les nuits sont plus douces, comme celle de l'International Jazz Day à la Maison Blanche, avec le couple Obama, dans les jardins alentour.

Christiane Taubira revient souvent sur ce qui lui tient à coeur : les injustices coloniales envers son pays (la cité spatiale pour laquelle on a exproprié des villages entiers, le trafic de l'or, la déforestation...), l'esclavage, le racisme ordinaire, et bien sûr la justice, la Constitution, la Déclaration des Droits de l'Homme, les lois. Elle cite à l'appui les poètes, les écrivains (là encore, on pourrait faire des listes, et cela me décide à lire les auteurs de la francophonie), les hommes politiques, elle trouve des musiques et paroles pour les moments traversés. Elle est très mélomane : classique, opéra, jazz - souvent, elle quitte le ministère pour assister à un concert ou à un opéra, un film, puis retourne à une séance de nuit à l'Assemblée, ou lire des dossiers.

Elle a vraiment une écriture très littéraire, exigeante, et raconte avec intégrité et discrétion, sans se mettre en avant, les événements, ses ressentis, perceptions et réflexions.
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