Citations sur La place de l'homme dans la Nature (25)
Ce n’est donc pas simplement sur deux (comme on dit souvent) ; c’est sur trois infinis (au moins) qu’est bâti spatialement le Monde. L’Infime et l’Immense sans doute. Mais aussi (enraciné comme l’Immense dans l’Infime, mais divergeant ensuite suivant sa direction propre) l’immensément Compliqué.
Si le pôle de convergence psychique vers lequel gravite, en s’arrangeant, la Matière n’était rien d’autre, ni rien de plus que le groupement totalisé, impersonnel et réversible, de tous les grains de Pensée cosmiques momentanément réfléchis les uns sur les autres, -alors l’enroulement sur soi du Monde se déferait (par dégoût de lui-même) dans la mesure même où l’Evolution, en progressant, prendrait plus claire conscience de l’impasse où elle aboutit. Sous peine d’être impuissant à former la clef de voûte pour la Noosphère, « Oméga » ne peut être conçu que comme le point de rencontre entre l’Univers parvenu à limite de centration et un autre Centre encore plus profond, -Centre self-subsistant et Principe absolument ultime, celui-là, d’irréversibilité et de personnalisation : le seul véritable Oméga…
Ce qui me paraît devoir caractériser une Humanité accédant, dans quelques millions d’années, aux zones « polaires » de l’hémisphère symbolique où elle se ramasse, c’est un état supérieur de réflexion collective se traduisant non point du tout par une dilatation et une diversification toujours plus grandes de notre champ d’affectivité et de connaissance, mais bien plutôt par une vision du Monde toujours plus étroitement localisée. […] L’Humanité finira quand, ayant enfin compris, elle aura, par une Réflexion totale et finale, tout ramené en elle à une Idée et à une Passion communes.
[…] la cérébralisation […] se refermant sur elle-même dans un processus de self-achèvement ; une auto-cérébralisation de l’Humanité devenant l’expression la plus concentrée du rebondissement réfléchi de l’Evolution.
Rien n’est plus injuste, ni plus vain, que de protester et de lutter contre le chômage grandissant auquel nous conduit inexorablement la Machine. Sans les multiples automatismes qui se chargent de faire travailler « tout seuls » les divers organes de notre corps, aucun de nous, évidemment, n’aurait les « loisirs » de créer, d’aimer, de penser -les soins de notre « métabolisme » nous absorbant tout entiers.
Mais, à mesure que, de par les progrès mêmes de la corpusculisation, les éléments de la chaîne phylétique augmentent en intériorité et en liberté, la « tentation » grandit inévitablement chez eux de se constituer chacun en fin ou tête d’Espèce, et de « décider » que le moment est venu où ils doivent désormais vivre chacun pour soi.
Par la percée d’hominisation, l’onde de complexité-conscience a pénétré, sur Terre, suivant le phylum Anthropoïdes, dans un domaine ou compartiment absolument nouveau pour l’Univers : celui du Réfléchi.
A force d’être des hommes, vivant parmi les hommes, nous finissons par ne plus voir du tout, à sa juste grandeur, le phénomène humain.
Tout au long des âges géologiques, une quantité toujours plus grande de substance nerveuse n’avait pas cessé de s’isoler (et de s’arranger toujours mieux) au cœur de la Matière vitalisée. La voici maintenant qui, sous sa forme la plus élaborée, géographiquement se rassemble. N’est-ce pas là un signe que, dans la bio-chimie planétaire, quelque grand événement se prépare ?
L’Homme : non pas un type zoologique comme les autres. Mais l’Homme, noyau d’un mouvement de reploiement et de convergence où se trahit localement sur notre petite planète (si perdue soit-elle dans le Temps et l’Espace) ce qui est probablement la dérive la plus caractéristique et la plus révélatrice des immensités qui nous enveloppent. L’Homme : ce sur quoi, et en quoi, l’Univers s’enroule.