Ce livre est né d'une série d'entretiens entre
Laurent Terzieff et la journaliste
Marie-Noëlle Tranchant. Celle-ci, dans une lettre qu'elle adresse à l'acteur disparu, faisant suite à une très belle préface de Fabrice Luchini, résume ainsi sa démarche : "plutôt qu'un dialogue, un florilège de souvenirs, de réflexions, d'expériences (...)". Ainsi, l'ouvrage débute par deux anciens articles parus dans les années soixante, puis se poursuit par un portrait dessiné par
Claude Roy, continue par une somme de souvenirs-réflexions, pour s'achever par des extraits de
carnets intimes, notes et cahiers rédigés par le comédien, pour certains recueillis après sa mort.
Tout au long des pages,
nous sinuons sur une route poétique faite d'exigence, de spiritualité, d'amour de l'art, d'expériences humaines, de rencontres, toutes choses qui n'ont pas "construit"
Laurent Terzieff, le mot me semble inapproprié, mais plutôt révélé à lui-même l'artiste exceptionnel qui ne demandait qu'à éclore du jeune homme tourmenté et suicidaire qu'il a été. Par bonheur,
nous échappons aux anecdotes "pittoresques", à une chronologie réductrice, et
nous laissons emmener dans le voyage d'une vie au service du théâtre, de la quête de l'absolu, avec une cohérence, une honnêteté intellectuelle qui forcent le respect.
Laurent Terzieff est un passeur, une sentinelle des âmes qui se cherchent, un guetteur sans relâche de vérité, un mystique athée, un amoureux du texte, de
Rilke et de quelques autres... Oui, dans ce voyage, les paysages sont magnifiques. Me reviennent en mémoire ces mots de
René Char dans "l'éternité à Lourmarin", texte dédié à
Albert Camus : "Il n'y a pas de ligne droite ni de route éclairée avec un être qui
nous a quittés...".
Mais
Laurent Terzieff ne
nous a pas complètement quittés, car, au fil des pages, comme une musique céleste, sa voix résonne en
nous, cette voix inimitable, habitée, poignante, toute en tension.
Cette voix qui
nous montre la voie.