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Critique de Eric76


Il faut le voir, ce prince de Salina, géant au regard jupitérien toujours courroucé, dominer son monde peuplé de nains qui s'agitent tout autour de lui ! Il faut la voir, cette illustre famille sicilienne traverser les siècles avec autant d'aisance et d'orgueil que Don Fabrizio, son dernier rejeton, quand il traverse les salles de son palais encombrées de meubles chargés d'Histoire et d'ancestrales tapisseries bariolées ! On pourrait la croire immortelle, cette famille de colosses qui a choisi le guépard comme emblème, et qui règne sans partage, avec quelques autres, sur ces terres de Sicile flagellées par le soleil.
Mais derrière cette façade faîte de puissance et d'éternité se cache les premiers doutes et les premières lézardes. Don Fabrizio a dans ses gênes toute l'expérience de ses aïeux, et le scepticisme fondamental des grands seigneurs. Il sait qu'il appartient à une « génération malheureuse à cheval entre les temps anciens et nouveaux ». Il sent ces ondes négatives qui tourbillonnent autour de lui et de sa famille ; il voit ces « mauvaises choses, des petites pierres qui courent et précèdent l'éboulement ». le point de bascule arrive en ce mois de mai 1860. Les petites pierres courent, courent, courent… Les chemises rouges de Garibaldi débarquent en Sicile. Tancrède, le neveu favori du prince, rejoint la rébellion et participe à cette guerre d'opérette. Opportuniste, il se marie avec la sublime Angelica, fille de Don Calogero, un parvenu, un rustre qui, à la faveur de cette révolution, détient désormais le pouvoir. Et pendant tout ce temps, les trois filles de Don Fabrizio s'enfoncent dans la bigoterie, et la poussière s'accumule dans les pièces désertées du palais du dernier des princes de Salina…
Un grand roman classique au style flamboyant. Un roman poignant où l'on ressent toute l'amertume et l'impuissance de Don Fabrizio qui voit son monde s'effacer aussi facilement que poussière au vent tandis que la vieille Sicile écrasée de soleil, farouche et misérable, reste immuable.
Un roman sur la décadence. Un roman sur la mort et la fin d'un monde. Un immense roman enfin qui rejoint l'universel. Tous les Hommes ont été à un moment de leur vie ce Don Fabrizio, ce géant orgueilleux, avant de voir ces petites pierres qui roulent les unes après les autres, avant de voir leur monde s'effriter et de s'effacer presque incognito pour rejoindre un coin d'ombre.
J'ai lu en commun ce livre avec mon amie Srafina. Autant vous dire que cette histoire bouleversante et pathétique nous a tous deux faits frémir. Je vous invite à lire son billet.



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