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Critique de larmordbm


Avant celle de Vendredi, c'est l'histoire de Robinson, seul rescapé du naufrage de la Virginie, qui nous est contée ici, histoire inspirée du Robinson Crusoë de Daniel Defoe.
Robinson vient donc de s'échouer sur la plage d'une île inhospitalière située au large du Chili.
Il va traverser plusieurs étapes durant les longues années de son séjour sur l'île qu'il baptisera Esperanza et on assistera, au fil de ces différentes phases, jalonnées de rituels initiatiques, à un véritable processus de métamorphose du personnage.
La première de ces phases est celle de l'hébétude, de l'horreur et du découragement, quand il comprend qu'il n'y a pas âme qui vive sur le territoire, et qu'il va lui falloir vivre sans autre, sans Autrui, sans un regard qui lui confère une identité et qui seul peut donner du sens à ce qu'il voit et perçoit. L'apparition du chien du bateau, sera source de soulagement, son regard et son semblant de sourire lui apportant une possibilité d'interaction.
Sans reflets ni repères, Robinson n'a plus de visage, d'amour propre. Dans un mouvement de repli, il se vautre, comme un animal, dans la boue, la fange, la souille.
Il se relève bientôt et entame une autre période, où pour retrouver son statut d'humain et de citoyen, il recrée les lois, les règles, les institutions, les contraintes d'une vie sociale. Au moyen d'une clepsydre, il recrée même le temps qu'il avait complètement abandonné, et commence, en parallèle, à livrer ses réflexions à un journal de bord. de cette manière, il a l'impression, un peu vaine, de maîtriser le cours des choses et les évènements.
La deuxième partie du livre est consacrée à la rencontre avec Vendredi, qu'il sauve fortuitement d'un massacre commis par des indiens, et à la transformation de leur relation qui évoluera de celle de maître à esclave vers un lien plus fraternel et égalitaire au travers de la contemplation partagée du soleil.
Un bateau accostera vingt-huit ans plus tard, mais Robinson et/ou Vendredi feront-ils le choix de monter à son bord et de quitter l'île ?
L'île Esperanza fait partie des principaux personnages du livre. Omniprésente, elle représente une figure maternelle, puis une amante. Robinson se consacre pleinement à elle. Il traverse à ses côtés, les moments les plus forts de son processus de transformation. Il régresse, à un stade animal, dans la souille, où il perd toute humanité. Il revit ensuite la période foetale, en se lovant dans une poche aux tréfonds d'une grotte. Il l'ensemence plus tard, ce qui donne naissance à de somptueuses mandragores.
Aux forces telluriques, dans lesquelles Robinson puise son énergie, viendra plus tard s'adjoindre celle du soleil.
Michel Tournier nous offre un magnifique et profond roman initiatique, mêlant mythes et réflexion philosophique, autour de la destinée d'un homme qui parvient, seul, à se reconstruire, en dehors de la civilisation, dans la confrontation et la communication avec les éléments. Sublime !
Pourquoi ai-je attendu cinquante ans pour le lire ?
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