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Critique de Zephirine


Lorsqu'on évoque l'oeuvre de Matisse, on pense tout de suite à ses nus d'un bleu cobalt qu'on nommera le bleu Matisse. L'oeuvre du peintre Henri Matisse, né à la fin du XIX e siècle, est colossale, mais ce que l'on connait moins, ce sont ses sources d'inspiration. Outre son épouse Amélie, nombre de modèles ont été ses muses pour un temps plus ou moins long, comme Hélène Galitzine, princesse russe exilée. Il y aura aussi Monique Bourgeois qui deviendra soeur Jacques-Marie chez les dominicaines et entrainera le vieux peintre à décorer la chapelle du Rosaire à Vence. L'un de ses modèles a été plus que cela pour le vieux peintre, c'est Lydia Delectorskaya. Russe de Sibérie, orpheline et pauvre, elle entre au service du couple Matisse pour un emploi sans qualifications : garde malade et dame de compagnie auprès de madame, intendante toute puissante du foyer.
Enigmatique, efficace et discrète, la jeune fille se fait sa place auprès du couple, entre l'épouse régente et le vieux peintre exigeant. Il faut veiller madame et poser comme modèle pour monsieur, des journées bien remplies mais jamais une plainte. Cela va durer des années jusqu'à ce que l'épouse prenne ombrage de cette fille trop belle dont la sensualité éclate dans les tableaux de son mari. Et puis, le contrat stipulait qu'elle était à son service, et la voilà qui consacre presque tout son temps à Matisse qui ne peut plus se passer d'elle en tant que modèle mais aussi d'assistante. La rupture est totale, on ne veut plus d'elle. Mais le maitre a trop besoin de cette fille qui l'apaise et l'inspire tout à la fois avec son calme et sa sensualité. Et, l'épouse partie, la voilà qui remonte en scène.
Lydia Delectorskaya va se consacrer entièrement au maitre dont elle connait les exigences. Elle le suivra durant la débâcle de la seconde guerre mondiale, tandis que lui refusait de fuir à l'étranger pour ne pas se séparer d'elle, l'étrangère.
A la mort du maitre en 1954, elle a quarante-quatre ans et elle est seule au monde. Elle gagnera sa vie en tant que traductrice de russe et restera fidèle à Matisse jusqu'à sa mort. Autrice de deux livres sur le peintre, elle restera muette quant à la vraie nature de sa relation avec le maitre.
On ne s'étonnera pas que François Vallejo ait été captivé par cette égérie qui garde sa part de mystère et ses secrets. A-t-elle été sa maitresse, ou bien cet amour réel entre eux n'a-t-il été que fantasmé ? On n'en saura rien, et elle sera bafouée, rejetée et traitée en ennemie et en intrigante malgré son altruisme et sa discrétion.
C'est là qu'entre en scène la fiction et l'auteur nous dit : « Seule une narration libre peut avoir la prétention de serrer d'un peu plus près le type de relation inédit qui s'est inventé, puis instauré entre un vieil artiste et une jeune partenaire. »
Tout au long de cette biographie romancée, l'auteur titille notre curiosité, il sait nous captiver tout en nous faisant découvrir la genèse des oeuvres de Matisse. C'est un véritable plaisir que de pénétrer l'intimité de dizaines de tableaux et dessins que Lydia Delectoskaya a inspirés au maitre.
François Vallejo n'affirme rien, il laisse ouverte la porte de tous les possibles. Cette biographie enrichie de l'imagination de l'auteur est écrite dans un style alerte et sans fioritures. Un vrai régal de lecture !

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