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Critique de moertzombreur


Vous avez déjà prit un bon coup de pelle en pleine gueule ?
L'auteur distille son venin en douceur, ce qui est bien avec David Vann, c'est qu'on ne sait jamais où l'on va, on ne contrôle ses réactions qu'avec beaucoup de difficultés, la pensée rationnelle est totalement laminée, petit bout par petit bout, on plonge dans un gouffre, et la chute est de plus en plus vertigineuse. Lire cet auteur est une expérience littéraire en soi, la perte de repères est totale, le malaise se fait d'abord discret, avant d'envahir l'ensemble du tableau. En plaçant son intrigue en plein soleil californien, il nous piège d'une belle manière. Il brosse le portrait d'une famille rongée par les conflits, dont la plupart se focalisent autour de l'argent de la grand-mère, mais peu à peu les tensions se déplacent, se font de plus en plus vénéneuses. La relation entre la grand-mère et ses deux filles, la violence physique entre les deux soeurs, l'amour trompeur entre une mère et son fils, et bouclant la boucle, de ce ce dernier avec sa cousine. Tout cela distille le poison, cristallise une bombe à retardement : Galen (le fils) est le narrateur, le révélateur et le filtre pourri de cette machinerie angoissante - “Il était une planète évoluant dans un néant glacial, en apesanteur. Sans air, impersonnel, avec une relation différente à la lumière. Maintenu en vie par une fine membrane” -, d'une noirceur indicible, choquante, et là je me pose la question, qu'est-ce que je suis en train de lire ? Pourquoi ne puis-je pas m'arrêter de le lire, le cauchemar est là, il m'enveloppe totalement, je poursuis ma lecture, impossible de ne pas continuer, de ne pas aller jusqu'au bout de l'impensable, d'un horrible imaginaire qui s'infiltre partout, comme un ver, est-ce la reconstruction d'un rêve ? L'écriture avance en
chamboulant nos certitudes, nos appréhensions les plus terribles, en dégommant par la même occasion la position, normalement confortable, du lecteur, on ne peut pourtant pas s'empêcher de laisser échapper un rire nerveux à certains moments, Gallen a un rapport tout particulier à la nature, et la manière qu'il a de pratiquer la “méditation” serait difficilement enseignable, même en Californie ! “(...) ce que Gallen ressentait, ou ne ressentait pas, allait bien au-delà de la philosophie ou de la religion, car ces deux éléments n'étaient que des systèmes d'attachement au monde. Ce qu'il ressentait, c'était la paix, la paix tout simplement, et c'était la manifestation du détachement. On ne pouvait jamais voir ni sentir le détachement lui-même, rien que son expression, ce déferlement de paix intérieure. Peut-être que le terme déferlement était une pensée trop active”. Tout cela est d'une noirceur dérangeante, d'une tristesse infinie, mais d'un magnétisme auquel on ne peut pourtant pas résister.
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