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Critique de Wendat69


La littérature sur le conflit de la première guerre mondiale est riche de grands livres, nombre d'ouvrages sur cette sombre période s'illustrent par leur profondeur, leur authenticité, indéniablement due au fait que les écrivains de talent qui ont porté l'uniforme et connu les affres de cette guerre sont légion.

Capitaine Conan figure dans cette littérature d'exception, et sans doute à une place particulière. Il n'est pas ici question de la Somme ou de Verdun, car l'histoire se déroule en un lieu et un temps particulier, au moment des derniers combats et juste après l'armistice, après que le sort des armes ait désigné vainqueurs et vaincus. Les faits se placent sur un front que nous avons tendance à méconnaître, celui de l'armée d'Orient, le front des Balkans, où tant d'hommes combattirent et disparurent, souvent dans l'ignorance de leurs contemporains.

En nous présentant le devenir impossible de ce capitaine de tranchée, ce chef de « corps franc », Roger Vercel fait, au fil des pages, éclater les certitudes morales d'une société qui s'est plongée dans l'horreur totale et qui tient à en effacer les traces les plus infamantes, fut-ce en supprimant ou rejetant ses propres héros, ceux qui l'ont sauvé de l'abîme.

Ces mêmes hommes un temps sublimés inspirent, à l'heure de la paix, la peur ou un certain mépris, car ils s'avèrent incapable de ressortir de ces tranchées, où ils tranchèrent des vies avec méthode et archaïsme, il leur est désormais impossible de déposer l'esprit guerrier qui leur fut imposé.

Le capitaine Conan sait que lui et sa troupe, composée de vulgus pecum ayant appris à tuer sans état d'âme, unis par les mêmes horreurs quotidiennes, par le partage de l'expérience du risque perpétuel, sont et resteront désormais des « inadaptés ».

Le temps de la paix n'est pas le leur, lui et sa troupe de « routiers », de « coupe-jarrets », ont trop longtemps versé dans la folie guerrière pour revenir un jour à la vie civile. Cette fraternité de tranchée, que les embuscades, les coups de main nocturne, à l'arme blanche, ont rendu indissoluble, condamne ces hommes à rester ce qu'ils sont : -des guerriers, à qui on ne peut dire que désormais l'arme est à la bretelle, et qu'ils doivent désormais reprendre la faux et semer la vie.

Non, les corps et les âmes ont trop longtemps été plongés en enfer pour qu'ils espèrent entrevoir le salut.

C'est ce drame que dépeint Roger Vercel dans ce livre, d'une grandeur indéniable, et qui fut adaptée avec justesse au cinéma.
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