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Critique de Lamifranz


Le roman est sous-titré « Voyage à travers l'Inde septentrionale ». Voilà qui situe l'aventure dans son cadre géographique : nos héros partent de Calcutta, longent les contreforts de l'Himalaya et redescendent ensuite vers Bombay. L'auteur, après avoir situé son histoire dans l'espace, aurait pu tout aussi bien la situer dans le temps : ce roman s'inscrit en effet dans une perspective historique : les années qui suivent la révolte des Cipayes (1857), le grand soulèvement indien contre l'Empire britannique.
L'argument de départ est assez simple : il s'agit d'une double vengeance : Nana Sahib, un des chefs de la rébellion, veut se venger du Colonel Munro, qui a de sa main tué son épouse la rani de Bhopal ; de son côté le colonel Munro rend Nana Sahib responsable du carnage de Cawnpore, où son épouse Laurence a disparu.
Au début du roman, on apprend que Nana Sahib n'est pas mort comme on le pensait lors de la révolte des Cipayes, il a reparu et sa tête est mise à prix par les Anglais. On le soupçonne de vouloir fomenter une nouvelle révolte. le colonel Munro a fait l'acquisition d'une machine extraordinaire, un monstre de métal en forme de locomotive, tirant deux wagons en forme de pagode et fonctionnant à la vapeur, appelé « Steam-House » (littéralement « Maison à vapeur »). Avec cet engin et accompagné de quelques amis, l'ingénieur Banks, Maucler, un invité français, et le capitaine Hod, grand chasseur de tigres devant l'Eternel, auxquels il faut ajouter soldats et serviteurs, au total une dizaine de personnes. L'expédition vers les contreforts himalayens est décidée : ce voyage d'agrément sera aussi un voyage de pèlerinage sur les lieux de la guerre, et peut-être l'occasion de croiser la route de Nana Sahib. Celui-ci envoie son espion Kalagani pour tromper la confiance du colonel, ce qu'il n'a pas de mal à faire grâce à l'entremise involontaire de Mathias van Guitt, un négociant en fauves, qui joue ici le rôle du savant farfelu et bon enfant. Après bien des aventures… on arrive à la fin du roman (vous ne pensiez pas que j'allais donner le résultat du match, quand même !)
Un moyen de locomotion improbable (un des plus farfelus et des moins scientifiques des « Voyages extraordinaires »), une intrigue simple, pour ne pas dire simpliste, un cadre géographique et historique plutôt convenu, on aurait pu qualifier « La maison à vapeur » de roman « à la pièce » comme il en paraissait tant à l'époque. Que nenni, braves gens ! Cette apparente facilité masque en fait une réelle invention, une création parfaitement orchestrée, où Jules Verne reprend ses plus grands thèmes : le voyage, avec comme motif ici la vengeance, un mode de locomotion original (ce n'est rien de le dire), de la révolte dans l'air, du mystère (quelle est cette apparition qu'on appelle La Flamme ?), des scènes violentes et parfois cruelles (au point que l'éditeur Hetzel a demandé un contrepoint comique avec van Guitt), du fantastique, de l'humour, et de l'éducation aussi, puisque le cours d'Histoire-Géo est bien présent, aussi riche en enseignements qu'agréable à lire)… Jules Verne sait maintenir le suspense jusqu'au bout, il a le sens du rythme et sait tenir son lecteur en haleine.
On remarquera aussi avec quelle malice l'auteur se situe dans le conflit anglo-indien. Si les « héros » sont plutôt les habitants de la maison à vapeur, les indiens ne sont pas présentés tout à fait comme des rebelles assoiffés de sang. Regardez bien : la trajectoire du Capitaine Nemo (telle qu'elle est racontée dans « L'île mystérieuse ») n'est pas bien éloignée de celle de Nana-Sahib.
La preuve que Jules Verne n'est pas seulement un écrivain pour la jeunesse : c'est un véritable auteur : auteur de romans indépendants, mais également d'une oeuvre globale qui présente une réelle unité.
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