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Critique de Bruidelo


« La véritable construction du post-exotisme a débuté lorsque j'ai publié, sous plusieurs signatures, le post-exotisme en dix leçons, leçon onze. le coeur du post-exotisme était proclamé, la vision d'un édifice devenait nette. »

Le coeur du post-exotisme, c'est donc un bâtiment de haute-sécurité d'une prison, où stagne une odeur de pourri, avec des flaques de moisissure sur les murs et le bruit obsédant d'une pluie incessante qui crépite sur la façade. de nombreux dissidents post-exotiques y sont morts, dont Manuela Draeger, un nom qui vous dit peut-être quelque chose: je vous avais parlé d'un de ses livres, Moi, les mammouths.
Là, peut-être que vous levez les yeux au ciel, ou que vous vous grattez le ciboulot en pensant : Mais qu'est-ce qu'elle raconte, à la fin, Manuela Draeger, céti l'auteur des enquêtes de Bobby Potemkine ou un membre de cette communauté de personnages incarcérés, imaginaires ??
Et bien c'est là un des charmes du post-exotisme, la différence entre auteur et personnage se brouille, la fiction déborde de l'intrigue, du livre, et se déverse sur l'espace de production de l'ensemble des oeuvres post-exotiques. C'est une grosse construction, un vaste édifice qui devra compter 49 livres signés par différents auteurs: Antoine Volodine, mais aussi Lutz Bassmann, Manuela Draeger, qui font partie de l'univers fictionnel tout en existant dans le monde de l'édition.
Mais revenons à notre prison. Après la lutte armée, les Égalitaristes post-exotiques, vaincus, incarcérés, déversent «sous forme romanesque leur passion non éteinte». Et même quand «l'espoir de possibles renouveaux et de possibles encore» s'éteint, ils connaissent un âge d'or grâce au gros pouvoir de leur créativité littéraire qui leur permet de réduire l'ennemi, dans l'espace de leurs oeuvres, à une ombre fragile.
Aussi sombre et horrible qu'il soit, il y a donc toutes sortes de lueurs dans cet univers carcéral puant, moisi et violent. Il y a la fraternité magnifique qui lie les post-exotiques - un lien fusionnel pourrait-on dire, le JE est pour eux un NOUS, un pour tous, tous dans un. Que les post-exos de toutes les cellules en Volodine soient unis, la fiction le justifie donc aussi.
Et puis, il y a de vigoureuses pirouettes, de puissants jeux de renversements, «une conception des contraires où les contraires se confondent», où par exemple le non-vivant est vivant, où, entre la vie et la mort, il n'y a guère de différence. C'est vraiment une consolation de lire ça, non, quand le début du livre nous avait un peu assommé en nous apprenant que l'ultime voix survivante du post-exotisme allait s'éteindre.

Pour qui s'intéresse au post-exotisme, ce livre est très intéressant puisque c'est là que s'est cristallisé ce monde parallèle. Mais bien sûr, il ne faut pas s'attendre à ce que tout devienne limpide pour autant, rassurez-vous, on continuera toujours autant à s'interroger sur les mystères post-exotiques, un des principes de nos écrivains incarcérés étant qu'«une part d'ombre toujours subsiste au moment des explications ou des aveux».
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