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Critique de bdelhausse


Le roman de Melanie Wallace prend la forme d'un roman choral pour raconter des destins qui s'entrecroisent et s'entrechoquent. de ces chocs naissent des amitiés et de l'amour, nous dit Melanie Wallace. Mais rien ne se fait simplement et sans heurts.

1974. L'action démarre à l'entame de l'hiver, un couple s'arrête dans un motel. Ils sont mal assortis. On comprend vite que ce couple est le fruit d'un moment d'égarement. Et ce fruit, c'est Luke, un bébé de quelques semaines. June est mère à 16 ans et Ward, le père de l'enfant, ne tarde pas à partir. le motel est supposé fermer en hiver. Mabel fera une exception pour June et Luke. Elle parle de cette fille-mère à Iris, une veuve recluse dont on apprend peu à peu la nature perverse de son mari, et dont la fille Claire est partie pour la ville une quinzaine d'années plus tôt sans donner de nouvelles.

Iris charge Duncan, l'avocat local, de s'occuper de June. Duncan aurait pu retenir Claire, en lui avouant son amour, mais il ne l'a pas fait. Il conduit June et Luke chez Oldman, un vieil homme qui a lancé la carrière de photographe de Claire. Il revoit en June une jeune fille croisée dans les décombres de l'Allemagne nazie, quand il était reporter de guerre. La générosité des personnages trouble June et le met mal à l'aise.

Non-dits et solitude. Les deux maîtres-mots du très beau roman de Melanie Wallace. le Maine (je suppose) en hiver. Les petites routes traversant les forêts. La nature. La solitude imposée par les distances et par la rugosité des âmes. Mais Melanie Wallace continue...

1977. L'hiver est là. Claire décide de revenir. Iris est au plus mal. La fin s'approche. Sam accompagne Claire. C'est une gueule cassée du Vietnam. Oldman, lui, a été défiguré par un singe. Claire s'offusque un peu de la présence de June qui recommence à penser qu'elle est de trop. Pourtant, à partir des solitudes individuelles, une sorte de famille s'est recréée. Famille dont est finalement exclue Claire, pourtant liée par le sang. de son côté, Sam, éternel solitaire par envie de se protéger, trouve en June et en Oldman des miroirs à sa propre solitude. le seul qui ne soit pas solitaire, c'est Luke. Melanie Wallace nous enseigne qu'on peut briser une solitude. Mieux, on peut capitaliser sur cette solitude et en faire une force pour vivre ensemble.

Les personnages de Melanie Wallace m'ont fait penser à ceux de Ron Rash, de Carver. Ce sont des brisés de la vie, des destins éclatés, des écorchés à qui la vie n'a pas fait de cadeau, et qui ont trouvé dans ce destin une force, une détermination. Bien sûr, Wallace n'est pas dupe, elle ne nous la fait pas à l'envers, elle ne repasse pas deux couches de rose sur un cabanon branlant... La reconstruction est dure, lente, longue. Elle vise la génération suivante, celle de Luke. Mais au-delà des coups durs, c'est en nous que réside notre destin, nous dit Melanie Wallace. Nous avons le choix: nous enfermer derrière des murs comme Iris, derrière des protocoles comme Duncan, ou nous ouvrir aux autres. Il y a de l'espoir chez Melanie Wallace, mais pour cela, il faut traverser l'hiver.

Un mot sur l'écriture très détaillée, minutieuse, précise de Melanie Wallace. Elle est faite de très longues phrases, entrecoupées, agrémentées de répétitions de verbes ou d'adverbes, mélangées de subordonnées ou de relatives... avec de la poésie qui déboule de nulle part pour repartir aussitôt. J'ai eu un peu de mal à entrer dans ce style. Mais une fois qu'on est dedans, on regrette d'en sortir.
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