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Critique de afriqueah


Bien que dans une expédition précédente, son père, qu'elle accompagnait, voulant rapporter des spécimens d'animaux sauvages au Musée de Berne, se soit fait tuer par un lion, Vivienne de Watteville veut de toutes ses forces aller voir au plus près ces bêtes.
Bien entendu, on se moque d'elle, on la déconsidère, on lui déconseille, mais son envie prend le dessus, là voilà en pleine jungle africaine, campant, entourée de pisteurs et d'un cuisinier. Un Denys (Serait ce le Denys de Karen Blixen ?) lui avait indiqué un itinéraire.

Le livre L'appel de l'Afrique (Séjour et méditations parmi les éléphants et les montagnes du Kenya) a été scindé en deux tomes : Un thé chez les éléphants, et Petite musique de chambre sur le mont Kenya.
Dans le premier, elle est l'invitée, se sentant parfois intruse, des éléphants. Ils sont, dit elle, moins intelligents que les éléphants de l ‘Inde, plus puissants et plus sauvages, incapables d'être domestiqués, dangereux en un mot.
Ce qui me paraît une force pas seulement physique, mais surtout une intelligence suprême : ainsi, pas de cornacs, de travail obligatoire, d'esclavage en forêt comme en Asie. ET elle qui évoque, derrière le regard muet et terriblement patient des animaux dressés dans les cirques, d'inimaginables profondeurs de désespoir, serait sûrement d'accord avec moi.
Vivienne s'est engagée à ne tuer aucun animal, elle fait des photos, et doute constamment (seuls les imbéciles ne doutent pas) du bien fondé de son intrusion : le déclic de l'appareil si minime soit il fait fuir les fauves. Elle refuse également de faire des photos debout dans une voiture, bien que zèbres et girafes prennent les voitures pour d'autres animaux et n'en aient pas peur. Les lions mangeurs d'homme entourent sa tente, même là, ne pas tuer, les faire fuir. Et un soir elle écoute avec ironie les boys discuter entre eux : « Les rhinocéros ne sont pas des animaux méchants ».
Pas de facilité, aller au devant du danger, point.
Elle doit apprendre à se placer « dans le vent », pour que son odeur ne soit pas décelée, car les petits yeux verts des éléphants n'ont pas de portée à plus de vingt mètres, mais leur odorat et leur ouïe sont puissants.
Elle observe, elle admire, elle voit jouer ses favoris entre eux, se battre aussi, et s'embrasser doucement et tendrement du bout de la trompe sur la bouche, baiser qui dure.
Car à une puissance et une taille considérable, s'allie la plus grande des délicatesses, un éléphant connaît parfaitement sa force et peut écraser une noisette sans la broyer. Un éléphant semble lui sourire d'un air entendu, (citation) d'autres chargent lorsqu'ils sont surpris ou soupçonneux, oreilles au vent, barrissement, trompe levée, moments inoubliables… puis ils stoppent, une fois que le message a été compris et que l'indésirable a quitté leur lieu.
Pourtant, il existe une frontière entre l'intrépidité et l'absurde témérité, et la peur tient plus de l'intuition que de la réalité, ainsi un éléphant solitaire (les plus dangereux) « était indigné de voir qu'en son absence on s'était approprié un de ses pâturages familiers. L'audace dont je faisais preuve, en allant l'ennuyer avec une infernale mécanique à bruit mécanique ajoutait l'insulte à l'injustice, et il s'éloigna vers la brousse. »
Les éléphants sont aussi capricieux et peuvent entrer en fureur comme montrer beaucoup de « bonnasse bienveillance », sans raison apparente.
Elle écoute Brahms, Mozart, Haydn et Schubert, dont elle choisit les morceaux en fonction de ses aventures du jour, et moi je les écoute en la lisant. Elle a tout : « des forêts à parcourir, des éléphants à photographier, des livres, avec tout le loisir nécessaire pour les lire, des montagnes 'escalader, une rivière au bord de laquelle rêver, la liberté et l'amitié du ciel et de la solitude » .
Et puis, le bonheur d'être, avec la visite de petits oiseaux dont elle décrit abondamment les couleurs « prune un ton de rouille dorée, et sur les ailes toutes les nuances de bleu, de vert, de l'opale et de la turquoise, « lapis lazuli et saphir.
On ne peut pas exprimer mieux le vrai bonheur que donne la nature, l'âme de l'Afrique. Méditation aussi sur la solitude et sur l'inanité des possessions, y compris la photo . Que vous soyez chasseur tuant les animaux, ou photographe, prenant d'eux une image, ils vous échappent : « le trophée est mort, la photographie n'est rien ». Y compris, même s'ils l'ont en quelque sorte adoptée, même si elle se sent fière de leur patience quand elle les présente à des photographes pourvus de tonnes de matériel, les éléphants ne lui appartiennent pas. Elle a bien conscience de la magnanimité des éléphants pour qui elle doit figurer comme une mouche obstinée et irritante.
Voilà, elle a été tolérée par quatre éléphants, c'est beau , disons adieu.
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