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Critique de Seraphita


1895 à Denver. Sam et Cora, deux jeunes orphelins, ont investi une usine désaffectée pour y accueillir et soigner des enfants abandonnés. Ils défendent bec et ongles leur « foyer » des attaques des sans-abris et, plus largement, de ceux qu'ils nomment les « têtes de noeud », c'est-à-dire les adultes. Car eux n'en sont pas, du moins pas encore. Et puis un géant défiguré, un vrai monstre de foire, fait son apparition dans leur usine. Avec lui, Sam se laisse entraîner dans les bas-fonds, ces milieux interlopes de Denver corrompus par le jeu, le sexe, l'argent et la drogue. Insidieusement, Sam va s'éloigner de Cora jusqu'au point de rupture…

« Les dynamiteurs » est un roman écrit par l'américain Benjamin Whitmer. C'est un roman noir, comme l'auteur y est accoutumé, « la quintessence du noir dans la plus magnifique tradition américaine » comme l'écrit Pierre Lemaître dans la quatrième de couverture.

L'intrigue est découpée en 44 chapitres brefs, porteurs d'un titre, chacun commençant par « Sam ». Par exemple, dans le chapitre 2, « Sam trouve un monstre sur le toit ». le ton a l'air badin, celui des contes, mais celui-là est bien cruel.

Au départ, j'ai été envoûtée par le style de l'auteur, sa « marque de fabrique » : ces phrases sont cinglantes, sèches et percutantes, comme des coups de canif dans le réel de la page : les mots vous sautent à la gorge. Ainsi, l'un des enfants découvrant Goodnight, le monstre, s'exclame : « — Un visage comme celui-là, ça a de quoi faire cailler le lait. » L'allusion, en soi, suffit à planter le décor et les personnages. Ces mots, ces phrases qui s'enchaînent sont comme des fulgurances, des éclairs de lucidité dans le noir des existences décrites.

Pour autant, assez vite, domine un sentiment d'écoeurement, de trop et de trop plein dans le noir, le trash, voire le gore : le propos est vraiment glauque, les personnages multiplient les exactions : règlements de compte, intimidation, meurtres… les corps souffrent, saignent, écartelés, les morts s'accumulent et ceux qui restent ne brillent pas par leur tendresse. Sam assiste à tout cela, participe, entre fascination et répulsion, manipulé par les « têtes de noeud » qui l'entourent. Ce faisant il s'éloigne de Cora, Cora dont le sourire vient « évider un espace dans [son] coeur et d'y emménager. »

Un roman noir, très noir et lourd, marqué par la beauté et la fulgurance d'un style au scalpel, mais qui reste bien trop glauque et laisse un haut le coeur après l'avoir refermé.
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