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Citations sur Sombre vallée (38)

Tous deux étaient restés un moment sans rien dire, séparés par tout ce qu’ils venaient de voir. Puis les yeux sombres et toujours en éveil du juge se posèrent sur la femme et il lui demanda : «Vous n’avez toujours pas envie que votre fils ait une arme ?»
La femme répondit à son regard en fronçant les sourcils, comme si elle ne comprenait pas ce qui aurait pu la faire changer d’avis. Holden fit un signe de tête en direction des corps étendus devant la fenêtre : «Et s’il finit comme ça parce qu’il n’aura pas pu se défendre ?»
La femme désigna à son tour l’endroit où s’était trouvé le cadavre du bandit : «Ils avaient des armes. Ils se sont défendus. Ça ne leur a pas servi à grand-chose.
- Ah, mais peut-être n’en avaient-ils pas suffisamment ? Ou bien ne savaient-ils pas bien tirer ?»
Holden ne donnait pas l’impression de croire vraiment à ce qu’il disait, mais il voulait provoquer cette femme.
«Mais peut-être qu’on les aurait simplement dépouilles et pas tues, s’ils n’avaient pas tiré», répliqua-t-elle – elle non plus ne paraissait pas convaincue par ses propres arguments. Holden se rendit compte qu’il devait jouer plus serré s’il voulait la faire fléchir.
«Vous ne voulez pas qu’il soit préparé, au cas où ?» insista-t-il.
La femme réfléchit un instant en quête d’une réponse imparable. « Ce n’est pas le fait de se préparer… C’est ce qui vient après, quand on cherche à mettre en pratique ce a quoi on s’est préparé.
-Vous croyez qu’un fusil, c’est une maladie ? Que ça donne la fièvre ?» demanda le juge sur un ton railleur.
Une fois encore, la femme réfléchit – puis elle acquiesça de la tête. C’était une drôle de façon de dire les choses, mais elle ne trouvait pas de meilleure façon de l’exprimer.
«Vous avez peur – vous ne voulez pas connaitre la vie telle qu’elle est ? essaya encore Holden, avant de donner lui-même la réponse a sa propre question : Non, non.» Il la regarda au fond des yeux, si intensément que la femme en frémit. «Vous la connaissez. C’est votre fils qui ne doit pas la connaitre.»
Un silence s’installa.
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"C'est ainsi que l'homme et l'animal sortirent de l'étroit et sombre goulet qui, entaillant jusqu'à mi-hauteur la paroi désolée du massif montagneux, débouchait sur une immense plaine entourée d'une suite de sommets, havre insoupçonné de calme, asile de fertile solitude. C'était un endroit qui se suffisait à lui-même et ne tolérait la présence d'aucun élément extérieur. Il ne se défendait pas contre les intrus, mais se refermait aussitôt derrière eux, interdisant tout retour à un autre monde."
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Du pied de la montagne d’où l’étranger était parti aux premières lueurs de l’aube, rien n’indiquait, même à un regard averti, la présence de cette haute vallée vers laquelle il se dirigeait maintenant avec son animal de bat. La faille qui y conduisait, prise entre d’abruptes parois rocheuses, était trop haute, trop étroite et trop encaissée. Quant au chemin, ce n’était guère plus qu’un sentier à moitié dévasté par les intempéries – il n’y avait en effet pas beaucoup d’échanges, il n’y en avait d’ailleurs jamais eu beaucoup, entre les gens de la plaine et les habitants de l’immense cirque montagneux. Pour ceux d’en bas, que l’on puisse vivre si près du ciel relevait d’une légende presque oubliée. Et pour ceux d’en haut, c’était très bien ainsi.
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C’étaient des cris de douleur, ces cris communs à de nombreuses créatures au moment de la plus grande douleur – des sons qui glacent le sang et rappellent à l’homme tout ce qu’il a de commun avec les animaux.
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Après les vapeurs grasses de l’auberge, le froid de la haute vallée frappa le visage de Greider comme une morsure. A l’intérieur, la fumée et la pénombre avaient formé une sorte de voile qui estompait tous les contours et atténuait tous les bruits. Mais ici, dehors, l’air avait quelque chose de dur qui s’étendait jusqu’à l’horizon, avec un gout métallique, et piquait les poumons. Le soleil pale de ce début d’hiver détourait chaque herbe, chaque pierre, avec une netteté presque cruelle dans sa simplicité. Chaque bruit résonnait avec une douloureuse clarté.
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Le curé se détacha de la foule, s’avança vers le traîneau et traça le signe de croix sur le front du mort. On voyait que même ce vieil homme dur qui, dans ses sermons, évoquait à l’envi des effrois des récits bibliques, le martyre des saints ou les tourments de l’enfer, était bouleversé par la vue de ce corps supplicié. Il finit par se détourner et entraîna les fidèles dans un Notre-Père pour cette âme rappelée au ciel de si atroce façon.
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Peu de temps après, un bruit retentit dans la vallée clair et limpide, mais redouté de tous : on sonnait le glas. Les gens sortirent des maisons et des fermes, pour savoir quel malheur était arrivé. Il y avait des fois ou l’on écoutait ce son de cloche avec une certaine philosophie, quand on savait par exemple qu’un vieux ou une vieille était à l’agonie depuis plusieurs jours ou que quelqu’un était atteint d’une maladie à laquelle il ne pourrait échapper, et cette cloche sonnait alors comme une rédemption, délivrance d’une âme échappant enfin aux souffrances d’ici-bas – finalement, on n’était pas trop étonné. Mais en ce moment personne n’était au seuil de la mort. On savait en revanche que des hommes étaient partis dans la forêt pour rapporter des billes de bois, on savait qu’une tempête de neige avait commencé et que – même si d’habitude ce n’était pas un travail particulièrement dangereux – c’était là-bas qu’il avait dû se passer quelque chose.
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Il lui sembla que rien ne pouvait mieux sceller l'accord entre ces gens et l'atmosphère de la vallée que l'absence de musique - ce refus d'utiliser la voix à d'autre fin que la parole, et encore parcimonieusement, refus d'employer son corps pour autre chose que le travail, et refus d'accorder à ses oreilles et au monde alentour d'autres bruits que ceux de la nature et d'un utile labeur. C'était véritablement une vie sans musique.
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Autant d'argent appartenant visiblement à un fou qui ne demandait qu'à en être délesté, voilà qui était un vrai don du ciel.
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Plus que jamais, il était un corps étranger dans cette vallée. Il avait été porteur de temps nouveaux. Mais quand ils ne disparaissent pas, les sauveurs deviennent vite un fardeau.
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