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Critique de miriam


Incipit :

"Depuis toujours, on racontait d'étranges histoires sur la région des montagnes du Nord ; histoires à l'image du caractère singulier et frondeur de ses habitants, selon l'opinion répandue dans le reste de l'Albanie. Ainsi cette querelle qui avait éclaté au début de la Grande Guerre entre les Autrichiens et les montagnards, lorsque l'armée autrichienne occupait le nord du pays. les premiers voulaient transformer en voie rapide l'ancienne route des caravanes qui traversait les montagnes, les seconds s'y opposaient. Dans le Kanun, le code ancestral des montagnes, il était écrit : "la route a des mesures précises : une hampe et demie. Elle doit être suffisamment large pour qu'un cheval lourdement chargé ou une charrette à boeufs puisse y circuler...."

Le ton est donné,rappelant Kadaré. Je pensais que le Kanun régissait le code d'honneur et les vendettas, je ne savais pas qu'il s'appliquait aussi aux détails des travaux publics.

le roman se poursuit comme un polar. Une voiture tombe dans une embuscade. Des bergers trouvent ses occupants morts. On imagine que l'enquête cherchera les coupables, les motifs, peut être les commanditaires....

L'histoire se poursuit à Tirana "modeste bourgade où l'on vendait autrefois du miel et du fromage de chèvre" devenue capitale d'un état Albanais encore balbutiant après la Grande Guerre. Les victimes sont deux Américains, le meurtre a des retentissements diplomatiques.

"...ce qui était arrivé était aux antipodes de l'esprit du Kanun. En Albanie, refuser l'hospitalité à un étranger était considéré comme la plus grande ignominie qui soit. Et pour les habitants des montagnes, l'hôte n'était pas seulement intouchable ; l'hôte, pour eux était sacré"

Journalistes, diplomates, habitués des cafés se passionnent pour ce qui est devenu une affaire d'Etat. le roman policier cède le pas à un roman historique se déroulant pendant  "une période difficile de la jeune démocratie albanaise" , la crise dans cet état balkanique après que le premier ministre ait essuyé un attentat en avril 1924. Différentes factions se disputent le pouvoir :  le Premier ministre, Fuad Herri, s'appuie sur les montagnards et la tradition, l'évêque Dorothéus revient d'émigration en Amérique et veut moderniser les moeurs politiques, les beys, enfin, ne veulent pas céder le pouvoir qu'ils détiennent depuis l'Empire Ottoman. Les puissances étrangères ne restent pas inactives : Américains et Britanniques convoitent le pétrole albanais. Serbes, Monténégrins et Grecs, verraient d'un bon oeil des rectifications de frontière à leur profit. Mussolini étendrait volontiers sa sphère d'influence à l'Albanie. Certains Albanais voit dans le fascisme un recours providentiel. Après des siècles de domination de la Sublime Porte les règles de la démocratie occidentales fonctionnent très imparfaitement, d'autant plus que la corruption est de rigueur. Les dessous-de table sont courants aussi bien dans la construction que dans l'obtention des concessions pétrolières.

"rafle tout ce que tu peux aujourd'hui, demain est dans les mains d'Allah". 

Le récit de la crise politique est loin d'être ennuyeux. Au contraire, le ton est tantôt burlesque tantôt ironique. J'ai beaucoup souri en lisant, et parfois ri à haute voix. 

"la sagesse populaire sait que les beys intelligents et les chevaux verts, cela n'existe pas"

L'énigme finit pas se résoudre (mais je ne vous raconterai pas comment). On peut aussi voir une parabole pour les "ingérences humanitaires", alors, la Société des Nations, aujourd'hui certaines ONG. 

Ce roman, basé sur un fait historique, est cependant une fiction, les noms ont été changés et l'auteur a pris des libertés littéraire. 

Lecture jubilatoire! 
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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