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Critique de Jackylebook


C'est la première fois que je mets la note maximale. Coup de coeur pour ce premier roman de Diane Wilson « Les semeuses », récompensé par le Minnesota Book Award for fiction.
Diane Wilson est une écrivaine d'origine autochtone, de la tribu sioux Mdewakanton dans le Minnesota. Elle est l'ancienne directrice exécutive de Dream of Wild Health, une ferme indigène à but non lucratif, et de la Native American Food Sovereignty Alliance, une coalition nationale de tribus et d'organisations oeuvrant à la création de systèmes alimentaires souverains pour les peuples natifs d'Amérique.

Dans ce livre, elle nous raconte de 1860 au début des années 2000, l'histoire poignante de quatre femmes indiennes de la tribu dakhota dans le Minnesota. Nous suivrons, principalement, l'histoire de Rosalie Iron Wing dite « Rosie » mais aussi de Gaby Makespeace son amie d'adolescence, Darlene Kills Deer sa grand-tante et Marie Blackbird son aïeule. Histoire triste, mais si belle, fable écologique et poétique que baigne la force de caractère de ces peuplades autochtones, leur esprit communautaire et de résilience.

Je laisse le soin à Diane de présenter son roman : « Les semeuses » a été inspiré par une histoire que j'ai entendue il y a quelques années, alors que je participais à la Marche commémorative dakhota. Une marche de deux cent cinquante kilomètres en l'honneur des membres du peuple dakhota qui avaient été déportées de force du Minnesota en 1863, à la suite de la guerre entre les Etats-Unis et les Dakhota. Nous parcourions vingt à trente kilomètres par jour, nous priions pour les mille sept cents femmes, enfants et aînés qui avaient été conduits sous la menace des armes depuis la réserve de Lower Sioux jusqu'au camp de concentration de Fort Snelling. En suivant le même chemin, nous rendions hommage à la souffrance et aux sacrifices de nos ancêtres.
Par une journée particulièrement longue et froide, l'un des marcheurs a partagé une histoire concernant les femmes de la marche originelle. Il a raconté que malgré le peu de temps à leur disposition pour se préparer à leur déportation, elles auraient eu besoin de nourrir leur famille où qu'on les envoie. Ces femmes avaient cousu des graines dans les ourlets de leurs jupes et en avaient caché d'autres dans leurs poches pour pouvoir les semer à la saison suivante. Au cours du long hiver passé à Fort Snelling, des centaines de prisonniers(es) étaient morts de maladie et de faim. Au Printemps 1863, quand on les avait entassés dans des péniches pour le long voyage en direction de la réserve de Crow Creek, dans le Dakota du Sud, les gens avaient continué à mourir à cause de la nourriture trop rare et avariée. Pendant toutes ses épreuves, les femmes avaient su protéger les graines pour garantir d'avoir de quoi manger pour les sept prochaines générations. La force dont ces femmes avaient fait preuve, le profond amour qu'elles avaient montré à leurs enfants et leur capacité à faire des sacrifices pour que leur peuple survive a constitué le coeur de ce livre. Je n'ai pas de mots pour exprimer la gratitude que je ressens. Ces femmes ont permis que le maïs dakhota existe encore aujourd'hui. »

« Comme ils priaient, nous avons entendu le chant que les anciens chantaient à l'aube
Leurs voix se mêlaient au vent qui berçait les branches du peuplier emplies d'étoiles
Nous avons entendu un chant qui était le nôtre, chanté par des humains nés de la prairie
Aimez les graines comme vous aimez vos enfants et le peuple survivra. »
Wachékiye

Je suis pris de remords, je me revois, enfant, regardant les westerns à la télévision avec de bons cow-boys et de méchants indiens. Loin de penser que les colons blancs avaient exproprié les tribus indigènes, déportées dans des réserves, et s'étaient appropriés leurs terres.

Rosie, notre héroïne, descendante de lignes brisées par le colonialisme n'échappera pas à la dureté de la vie. Elle perd sa maman, Agnès, toute jeune et à l'âge de douze ans, dans les années 1970, son papa Ray. Mineure et sans famille proche connue (car dispersée) elle est placée dans des familles d'accueil blanches, d'où elle s'enfuit à la majorité pour gagner sa vie. Dans ces régions comment échapper aux travaux agricoles, elle atterrit dans une exploitation gérée par un cultivateur solitaire (après le décès de ses parents), John, descendant de colons. Rosie, sans domicile, sera bientôt hébergée par l'exploitant. Les sentiments viendront pour se terminer en mariage duquel naîtra un petit Tom. le couple traversera des orages dus à leur origine, leur éducation, mais aussi sur le plan professionnel avec l'arrivée de l'agriculture industrielle. Rosie, l'ancienne petite « squaw », la « peau-rouge » se battra pour trouver place dans la société, pour elle et son petit Tommy.

Vraiment émouvante cette lecture, sous la plume fluide de Diane Wilson. le désastre climatique annoncé et les divers périls nous font prendre conscience que nous devons respecter la Terre. Bien avant nous, les peuplades autochtones indiennes respectaient la vie et la nature, nous traçaient la voie à suivre dont nous nous sommes écartés, nous ferions bien de s'inspirer de leur sagesse pour un meilleur avenir.

Je vous conseille vivement la lecture de ce livre édifiant.
Mille mercis aux Éditons Rue de l'Échiquier pour cette belle découverte.
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