AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de gatsbi


Quelle belle surprise que ce Golden State ! En puisant (beaucoup) dans les grands classiques de la dystopie que sont 1984 et Fahrenheit 451, Ben H. Winters nous sort une nouvelle contre-utopie dans un style résolument moderne, à la sauce polar, rien que ça !

L'idée de base est toute conne et m'a séduit d'emblée : dans cette société, le mensonge est proscrit par la loi ! Une de ces idées simples qui fondent tant d'histoires de SF (comme les hommes qui dorment 20h par jour dans Les bras de Morphée, de Bécu). Une idée tellement géniale qu'elle a dû caresser l'esprit de tous les auteurs du genre, non ? Voyons, dans la plupart des contre-utopies, et il en va de même des régimes totalitaires, le pouvoir en place se maintient à grand renfort de récit officiel et de propagande. du grand classique. L'originalité de Golden State est d'inverser la relation : la seule société vivable est celle qui se fonde sur la vérité intangible (l'unique récit), et l'état se met à son service en garantissant son intégrité, sa complétude et son accessibilité aux citoyens. Évidemment, la notion de vérité ou de réalité des faits étant un sujet hautement philosophique, on se doute qu'il y a anguille sous la roche du Golden State

Les 400 pages de ce roman se lisent comme du petit pain.
Je ne suis pas un amateur du genre policier, mais je reconnais la force de ses figures, de ses clichés et de ses ressorts pour faire fonctionner une histoire. L'inspecteur usé et sa jeune recrue imposée, la scène du crime, la course poursuite, l'opposition entre les différents corps de métiers, la justice, l'infiltration, la corruption… Tout y est ! Alors oui, c'est du polar vu et revu, mais c'est aussi pour ça que le divertissement fonctionne parfaitement.
Ajouté à cela une écriture parfaitement fluide et maîtrisée, même si elle n'a rien d'exceptionnel. Un point m'a impressionné : tout au long du roman, le personnage principal (l'inspecteur et narrateur) nous commente en temps réel son usage d'un pouvoir mental de « discernement de la vérité » que seule sa caste possède. D'après mon expérience, c'est assez difficile à réaliser sans alourdir le texte. Winters s'en sort haut la main, alors que le résultat m'était apparu bien plus mitigé dans le Silence de la cité, de Vonarburg, par exemple.

Au niveau des thèmes, comme je l'ai dit, on sent une grosse inspiration des grands classiques.
De 1984, on retrouve la société de surveillance, certaines institutions d'état spécialisées, les livres autorisés, le traitement linguistique fouillé (les noms des institutions, les bonjours remplacés par les échanges de tautologies…).
De Fahrenheit 451, on retrouve le choix ironique du héros parmi la caste la plus emblématique de la société, mais aussi et surtout, le coup du livre... Non, Ben ! Comme t'as pu pomper le coup du livre dans Fahrenheit 451 ??? On voit illico où ça va nous mener du coup… Je n'en dirais pas plus, mais c'est quand même osé !


Quelques légers défauts que j'ai relevés :

- Un certain manque de crédibilité parfois.
Ainsi notre inspecteur est à la limite de l'obésité, mais il met toujours un point d'honneur à courir après, rattraper et menotter lui-même les fuyards, avec un certain succès apparemment.
Il est aussi une grande-gueule colérique mais fait preuve d'un grand sang-froid lors des interrogatoires.

- J'attendais beaucoup de la réflexion autour du concept et de la société qui en découle. L'auteur a clairement fait son job en théorisant de manière convaincante et en développant de nombreuses idées intéressantes qui relativisent l'apparente omniprésence de la vérité : accès à l'information parfois coûteux en temps et en moyens, sélectivité de l'information diffusée dans les médias. En revanche, j'ai trouvé vraiment dommage de n'avoir pas plus développé l'incidence de cette société sur la délinquance en col blanc, la corruption, les pratiques de dissimulation et la culture du secret qui caractérise la caste dominante.

- Si la dernière partie ne manque pas de rebondissements, elle part aussi un peu dans tous les sens et le message se brouille derrière une multitude d'interprétations. le dénouement quant à lui m'a moyennement convaincu.

- L'auteur a su fondre deux grands classiques pour créer une oeuvre possédant ses qualités propres, ce qui est remarquable. En revanche, la dimension émotionnelle, très présente dans ses deux sources d'inspiration (et habituelle dans le genre dystopique, comme dans Un bonheur insoutenable, du maitre Ira Levin), se trouve ici très réduite, malgré la ligne dramatique. le ton décalé et plaisant du narrateur y est sans doute pour quelque chose.
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}