AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Patsales


Auteur brésilien (si, si), Xerxenesky situe son dernier roman en Suisse et lui donne comme héros un Français. Il faut préciser que l'histoire se déroule dans l'immédiate après-guerre et que la neutralité suisse ainsi que les ambiguïtés françaises entre résistance et collaboration ont beaucoup à voir avec le thème de ce roman.
Dans la clinique où il travaille, le docteur Nicolas Legrand tente de guérir de grands désespérés, traumatisés par la guerre. Lui-même est une personnalité borderline et le chemin qu'il parcourt chaque jour entre son travail et son domicile est comme une métaphore de son combat pour ne pas perdre pied: la neige recouvre des pièges insoupçonnés, et de la forêt qui borde la route surgissent de mystérieuses créatures, cerf majestueux ou enfant solitaire.
Pourquoi est-on étreint par une tristesse infinie ? À cause de la guerre? Ou d'une inclination innée au désespoir que n'affecte aucun environnement ? de l'hérédité ? D'une blessure narcissique ? Comment soigner ceux qui souffrent ? Freud a-t-il raison de croire au pouvoir de la parole ? Ou la chimie n'est-elle pas l'arme ultime pour délivrer l'âme de ses tourments ? A moins que la philosophie, parce qu'elle nous intime de donner un sens à notre vie, ne soit le plus sûr moyen de rester debout.
D'ailleurs souffrir n'est-il pas un luxe? A-t-on le droit d'être malheureux quand on n'a pas connu de vrai drame dans sa vie ? Nicolas, protégé par son prépuce intact et son nom passe-partout a traversé la guerre planqué à Vichy. Comment oserait-il se dire malheureux ? Un hypocondriaque mérite-t-il les mêmes égards qu'un « vrai » malade sous prétexte que son angoisse n'est pas feinte ?
Et si un médecin peut sentir exaspéré par un désespoir sans cause réelle, que doit-il faire dès lors que son patient est un salaud ? Un psychiatre juif a-t-il le droit de ne pas s'occuper d'un sympathisant nazi, même si sa maladie mentale est avérée ?
Et ces rafales de questions sont-elles la meilleure solution pour vous convaincre de vous jeter sur ce livre? Car sa modestie, son absence d'esbroufe est sans doute son plus grand charme. Vous n'aurez pas l'impression de devoir affronter une tempête métaphysique à forte prétention intellectuelle. Il ne s'agit que d'un homme qui se demande comment faire au mieux son travail, que d'un couple qui cherche, sinon à être heureux, du moins le moins malheureux possible. Xerxenesky a écrit ce roman après avoir été soigné pour un épisode dépressif. Et dans le monde comme il va, sans doute l'impossibilité d'être pleinement heureux est-il le sentiment le plus normal qui soit.
Commenter  J’apprécie          3411



Ont apprécié cette critique (34)voir plus




{* *}