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Critique de SamDLit


# Hiver 2021-2022 # Premier Roman # Enfance et Violence # Fuite éperdue

Cours Victor. Cours. Cours à en perdre haleine et la raison peut-être ?
Dévale les pentes sur ton skate, tu peux ôter ta capuche, les vents mauvais sont derrière toi (j'y crois et toi aussi) *

- Je dédie ce retour de lecture à Seb, fou de planches (Skate & Bd), à son sweat, sa capuche et ses chutes - raison du choix de cette lecture -


Histoire de la guérison d'une enfance et d'une famille dysfonctionnelle. de la course effrénée pour lui échapper, pour échapper à ses souvenirs, pour échapper au passé et se tourner vers le futur ou pour s'engloutir en soi-même et s'y perdre.

Histoire de rencontres inattendues, inespérées sur des parcours parfois semés d'obstacles dès le départ, avant même la naissance, ou qui arrivent au fur et à mesure que l'on grandit.

L'Auteur alterne une écriture rythmée, musicale, essoufflante, en souffrance parfois avec des passages plus posés, pauses, presque silences à certains moments, plus bavards à d'autres. Des moments de tension au bord du gouffre succèdent à des passages où lecteur et héros peuvent reprendre respiration. le sprint prend le relais avec le demi-fond, le skate et la course de haies avec le semi-marathon.


Un premier roman interpellant. Un dossard (Auteur) à suivre.


"Accorde ta confiance à la course. Au bitume. Quoi qu'il advienne, ressens que la course fait partie de toi. Que c'est ainsi qu'il faut que les choses soient : en mouvement. Tant que ton corps te porte, tant qu'il résiste, qu'il supporte ce que tu lui infliges, tant que tu enfouis la douleur en lui. Tant qu'il se tait.
Ne pense jamais à la chute "


Dans toutes les violences dont sont victimes les enfances, il existe - parfois - un phare, une lumière, un refuge.


"Les yeux des félins se ferment dans la nuit qui occupe tout l'espace. Ils vont, portés par le vent, puis je me mets à courir derrière eux. À son tour, le vent devient mon ami. Son souffle caresse mon dos, m'encourage à accélérer, à me surpasser, me fait bomber le torse. le vent, ce câlin qu'on donne à l'enfant. Une berceuse rassurante, un bras protecteur, qui vient vous chercher dans le lit quand la chambre est déserte, la maison vide, quand vous vous réveillez, perdu dans une mer de songes. Dans tous les mauvais rêves, il existe un refuge. À l'heure de la course, c'est le vent qui l'incarne."


Dans ce roman, nous rencontrons d'abord Victor, 17 ans, dans sa course effrénée sur le bitume, sur l'asphalte qu'il martèle au rythme de phrases courtes, cinglantes, volantes, musicales, au rythme de ses foulées. Un adolescent en rupture qui court à en perdre le souffle, la raison pour que cessent les battements de son coeur.


Ce qu'il fuit, qui il fuit, pourquoi il fuit est peu à peu amené dans l'histoire
L'auteur arrive à nous faire dépasser la course éperdue de Victor, cet ado, avec un phrasé scandé, musical, percutant et à nous faire remonter avec lui dans son passé et dans celui de sa famille dysfonctionnelle


Peu à peu, nous remontons jusqu'à sa naissance et même avant, jusqu'à l'enfant Victor coincé entre un père, Louis/Luigi qui a érigé la menace, la violence en normes familiales et une maman, Agnès, qui peu à peu s'est effacée, quitte à se dissoudre dans l'alcool et à finir par disparaître complètement.


En cours de route, lors de cette course, lors de cette fuite, Victor, au temps présent, rencontre quelques personnes atypiques profondément humaines même si un peu perdues elles-mêmes. Chacune à sa manière lui tend une main secourable, en devenant, un temps ou plus, un phare, un refuge.


Justine, rencontre éphémère, lui offrira un toit, un abri, un repas, une chaleur temporaire. Rachid deviendra son frère d'asphalte, son frère de skate, un grand frère de coeur et finira tout comme Kadija, à former pour et avec lui une famille de choix: celle qui éclaire la route lorsque les temps sont mauvais; celle qui accompagne lorsque la vie sourit.


! citation ! (précision)
"Baigner dans le rien. le vide. L'inexistant.
Les sentiments, même pas.
La nostalgie, même pas.
La mémoire, même pas.
Les larmes, la peine, la joie, même pas.


Tout ce qu'on éprouve, ce qu'on ressent, au débarras.
Dans la grande remise que forme l'absence de tout.
Relié à la vie par un fil qu'on utilise pour remonter à la surface. S'en saisir. Se hisser. Quelques notes. Quelques marches. Se donner la peine de les gravir. Écouter. Ne pas succomber. Vouloir. Préférer vivre. Préférer lutter. Aller au combat. S'accrocher. Se battre. Violenter. Avaler les notes. Les ingurgiter. Les digérer.
Les ranger dans un coin. Dans un coin de la conscience. Des réserves pour plus tard. Un butin. Un pactole. Dont on se servira. Dans lequel on piochera. Quand il faudra y aller. Quand il faudra se souvenir. Mettre sa vie au clair.


« Tout ira, Capuche. »


Asphalte, Matthieu Zaccagna
@ éditions Noir sur Blanc, collection Notabilia, 6 janvier 2022

Une maison d'édition & un auteur découverts avec ce titre via NetGalley
- Merci pour cette course pleine de surprises et très prenante -
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