Après plusieurs journées de prière, le chanoine Auguste Daguzan choisit plusieurs confrères parmi les volontaires non-allemands pour aller porter assistance aux malades et agonisants des blocks en quarantaine. Rejoindre ces baraques suppose un courage et un dévouement hors du commun puisqu'il n'est plus question d'en sortir, une fois la porte franchie, jusqu'à la fin de l'isolement."L'action consiste simplement à s'enfermer dans les baraques des typhiques. Vivre comme des vivants pour aider les mourants à mourir comme des vivants."
Rappelez-vous, mes camarades, notre amitié de là-bas, cette extraordinaire entraide fraternelle, le morceau de pain que, mourant de faim, on partageait avec ses camarades de misère, le dernier morceau de sucre qu'on sacrifiait pour un mourant, le sourire dont on encourageait les camarades afin que leur travail fût moins lourd [...]. Mais dites-moi, le camp de concentration, le garde-chiourme, la Gestapo seraient-ils indispensables pour que nous apprenions à nous aimer entre Français, entre chrétiens ? Est-ce que l'essentiel de notre christianisme n'est pas cet amour des uns pour les autres ? [...] De grâce n'attendons pas demain ; aujourd'hui même et tout de suite, là, dans la rue, dans le métro, à l'atelier, au bureau, dans la famille, dans la vie quotidienne, au nom de tous nos morts qui nous regardent et qui nous attendent, au nom du Christ, je vous en conjure, mes camarades : "Aimons-nous les uns les autres".
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La comparaison avec les persécutions subies par les premières communautés chrétiennes à Rome n'est pas qu'une vue de l'esprit. Comme leurs prédécesseurs des catacombes, les prêtres de Dachau utilisent l'acronyme "Ichtbus" - qui signifie "Poisson" en grec - comme nom de code pour désigner les hosties consacrées. Chacune des lettres est l'initiale des mots : "Iesous Kristos Theou Huios Soter", soit "Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur". Sur les enveloppes de papier qui circulent sous le manteau, le mot "Ichtbus" ou un poisson dessiné permettent de savoir que les précieuses espèces y sont dissimulées.
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Mère de Dieu, je vous implore, prenez-moi dans vos bras et faites-moi traverser cette journée sans que rien ne m'arrive.
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L'un des de violence les plus spectaculaires concerne le père Andreas Rieser, un prêtre tyrolien, forcé par un SS à confectionner une couronne de fil de fer barbelé et à s'en coiffer. Des détenus juifs, convoqués par le gardien, doivent alors danser autour de lui, le couvrir de coups et de crachats, dans une parodie effrayante du récit de la Passion.
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Dès lors, le bâtiment, dont la cheminée toujours fumante est visible depuis une grande partie du camp, prend place dans l'univers des prisonniers. A tel point que dans les conversations entre déportés, ou dans les menaces des SS, il n'est pas rare d'entendre la plaisanterie selon laquelle le seul moyen d'évasion du camp consiste à "passer par la cheminée".
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Le 7 octobre1938, dans la cathédrale Saint-Etienne de Vienne, Mgr Innitzer déclare : "Il n'y a qu'un seul Führer : Jésus-Christ."
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" Délivre ceux qu'on envoie à la mort, ceux qu'on entraîne au supplice, retiens-les." (Prob 24-11)
Sur les 2720 ecclésiastiques qui furent emprisonnés à Dachau, 1034 sont morts durant leur détention.
Le spectacle des prêtres affamés fait parfois vaciller les gardes. Pris de pitié pour l'un d'entre eux, un jeune SS consent un jour à lui donner le contenu de l'écuelle de son chien.
Quiconque était dénué de la faculté d'adaptation, du talent d'organisation, du zèle, d'esprit de commerce, d'audace et de chance également, était un pauvre homme voué à la mort dans le camp de concentration.
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