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Critique de Nastasia-B


Pot-Bouille, c'est du très bon Zola. Peut-être pas le meilleur qui soit, mais sans nul doute du très bon, bien plus agréable à mes yeux que les deux volumes précédents, Une Page D'Amour et Nana.
On renoue ici avec une mouture que j'aime assez, une façon d'écrire qui me rappelle celle de la Conquête de Plassans ou qui annonce déjà celle de la Terre, par exemple.
À bien des égards, cet opus n°10 fait figure de diptyque : une sorte de dédoublement du n°7, L'Assommoir en version bourgeoise ou bien alors, une manière de préambule au n°11, le célèbre Au Bonheur Des Dames.
Tout d'abord évoquons ce titre étonnant, difficile à comprendre de nos jours, mélange de pot au feu et de bouillabaisse, rimant admirablement avec tambouille et évoquant la "petite cuisine", comme on dit, ce qui se passe en arrière-cour, loin des façades sublimes, parfaitement lisses et polies, agrémentées de brillants et de couleurs affriolantes.
Là, pas d'erreur, qu'on ne s'y méprenne pas, on est dans la crasse, dans l'égout, dans la vomissure, dans la pourriture glauque et flasque que les gens "comme il faut", que les "braves gens" s'ingénient à minutieusement dissimuler derrière des sourires de façade, de belles manières et des attitudes altières.
L'idée d'Émile Zola est manifestement, après la joute en direction de la classe ouvrière qu'était L'Assommoir, de rentrer dans le lard de la bourgeoisie, en peignant ces familles "dignes" qui se bouffent la rate, et en lui signifiant bien qu'elle ne vaut rien, absolument rien de mieux que le bas peuple, l'hypocrisie en plus.
On assiste donc à l'arrivée à Paris d'Octave Mouret (le frère de l'abbé Mouret du tome n°5), jeune loup aux dents longues, qui rêve de conquêtes, que ce soit de femmes ou de commerce ; il veut faire un magasin éblouissant qui rayonnera loin à la ronde et qui écrasera tout.
Celui-ci est donc introduit par l'architecte Campardon dans un immeuble bourgeois, typiquement haussmannien, qui se targue d'une très haute respectabilité et d'une morale impeccable.
L'auteur utilise admirablement le contraste naturel, technique presque, entre l'escalier principal, grand, beau, majestueux, grandiloquent, illuminé, orné d'un tapis rouge, destiné à être vu et montré, et l'autre escalier, l'escalier de service, dissimulé aux regards, celui qu'on veut absolument cacher, étroit, ténébreux, crépusculaire et où pourtant circulent et se passent beaucoup de choses, pour ne pas dire, les principales.
Tout au long du roman, Zola s'applique à descendre en flèche chacun des locataires de chaque étage, de la loge du concierge jusqu'aux chambres de bonnes, sans oublier les propriétaires. Tout le monde y passe, à tour de rôle, à l'exception notoire d'un foyer, siège énigmatique de la famille d'un écrivain qui passe son temps à calomnier la bourgeoisie...
Tiens, tiens..., mais qui cela pourrait-il bien être ? Aucune idée !
Bah oui, il ne pouvait pas trop faire autrement notre Zozo qui accuse, que de se ménager une petite porte de sortie car il crache un peu dans la soupe, lui qui, à cette époque-là, s'était mis à vivre exactement comme les bourgeois sur lesquels il tirait à boulets rouges.
Ce genre de dissonances mises à part (il en était de même pour Hugo), l'écrivain signe un livre féroce, impitoyable à l'égard de l'absence de moralité de cette classe, dont la réalité exsude par la bouche des domestiques, qui vident le fiel côté cour, par la fenêtre des cuisines, non loin de l'escalier de service.
On est lubrique, adultère, cupide, calculateur, mesquin, hypocrite, menteur, faux-dévot, insensible, inconséquent, etc., etc., etc.
Pas besoin de vous faire un plus ample dessin, vous avez bien compris qu'elle sent le gâté cette pot-bouille, mais qu'elle vaut le détour. Ceci dit, ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, bien peu de choses.
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