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Critique de tiptop92


Emile Zola - La Débâcle - 1892 : On n'évoque jamais la débâcle quand on parle des livres sur la guerre qui ont compté dans l'histoire de la littérature. Pourtant c'est un des plus poignant écrit sur le sujet. Fort de sa fibre naturaliste Zola décrivait avec un réalisme cru les misères des soldats épuisés par les marches et les contremarches, affamés par le manque de ravitaillement et démoralisés par les inepties d'un commandement complètement dépassé par la situation. Il n'excluait pas non plus les souffrances des civils témoins des destructions et de l'humiliation d'un pays foulée au pied par un ennemi trop fort. le courage inutile des soldats français dans des batailles perdues d'avance sonnait le glas d'un empire en complète décrépitude à l'image de Napoléon III qu'on croisait au fil des pages ravagé par la maladie et le désespoir. L'écrivain au plus près du récit historique trempait ses personnages dans les épisodes mythiques d'un conflit qui ne rapporta que peu de gloire à une armée totalement déboussolée par l'incurie de ses chefs. Pourtant malgré la situation désespérée des héros anonymes firent le coup de feu jusqu'à la mort dans des épisodes restés célèbres comme à Bazeilles dans la maison des balles ou en participant à la charge insensée de la division Marguerite sur les lignes de défenses prussiennes. En effet ces cinq milles cavaliers lancés sabres au clair firent preuve d'une telle furia que l'empereur allemand présent sur les lieux ne pu s'empêcher de s'écrier «Ah les braves gens !!». Outre les morts, ce déchaînement de violence engendra un nombre de blessés effrayant qui subirent dans leur chair mille tourments liés à une situation sanitaire catastrophique. Zola pouvait laisser libre cours à son emphase en dépeignant les éclopés, les fiévreux et les agonisants rendus fous par la peur de mourir et la douleur. Ce livre n'était pas qu'un compte rendu asymétrique des évènements qui pendant quelques semaines enflammèrent les Ardennes et la Lorraine, c'était aussi à cause ou malgré les combats une belle histoire d'amitié entre Jean le paysan raisonnable et Maurice le citadin révolté. Ces deux-là après des débuts difficiles se donnaient l'un à l'autre comme des frères avant de laver ce lien dans le fracas terrible de la commune de Paris. Dans une coïncidence fortuite comme seuls les romanciers de l'époque pouvaient se le permettre, Jean passé dans l'armée Versaillaise transperçait de sa baïonnette Maurice qui continuait sa lutte contre l'ordre établi au côté des insurgés. Aucun apaisement ne venait donc pour eux de la fin d'un conflit qui les privait chacun de l'essentiel, l'un de la vie et l'autre de l'amour. Car Henriette la soeur du jeune sacrifié qui devait donner son corps et son âme à l'ami parfait s'éloignait dans un veuvage décidé qui excluait le meurtrier de son frère. Ce livre en même temps que la déchéance de l'empire signait la fin des Rougon-Marquart en tant que dynastie. Eux qui s'étaient élevés à la suite de cette nouvelle élite retournaient dans l'anonymat du peuple et dans des vies sans éclats… un ouvrage magnifique et terrible
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