Que de familles entières accourent rien que pour avoir la chance de manger une platée de riz, _ voilà qui nous apparaissait à nous, gosses de riches, comique au plus haut point. Mais aujourd'hui, ce souvenir me brûle de honte: ne pas pouvoir manger ce que l'on a récolté soi-même à la sueur de son front, et accepter avec joie, comme une faveur insigne, quelques restes que l'on vous abandonne, _ n'est-ce pas là une atroce dérision?
Si le lecteur a la patience de me suivre jusqu'au bout, il se demandera peut-être, en refermant ce livre, pourquoi j'ai fait publier un texte pareil.
A cette question, ma réponse est bien simple:
"Aujourd'hui que la Révolution a triomphé, les petites gens de mon espèce n'ont toujours rien à manger!"
12 janvier 1929