AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de MlleJulie


Extrait
Appleton. Je reconnaissais ma ville. Avant que mes parents ne disparaissent, nous avions vécu tous les trois ici, dans une petite rue bordée de poiriers du Japon, juste à côté de la rivière. Depuis, la façade de l'école avait été repeinte en jaune, la boulangerie était devenue un office du tourisme, la rue principale avait été pavée et le grand arbre devant la mairie, abattu. Comme je regrettais cette ville, comme je regrettais la vie douce, les choux à la crème du dimanche... les câlins de ma mère, le rire de mon père.
Le cocher fit une halte dans la rue commerçante, devant le débit de boissons, et chargea des caisses de jolies bouteilles de verre remplies d'eau minérale. Je lus à haute voix :
- Eau du glacier.
J'étais pourtant seule dans la calèche. Personne ne pouvait m'entendre. Je parlais sans doute pour me rassurer. C'était la première fois que je voyageais sans autre accompagnateur qu'un cocher. Je rêvai un instant en fixant le bout d'Easton Road. Je les vis, Papa, Maman... Ils marchaient vers moi, ils souriaient, ils venaient me chercher. Maman tenait son grand chapeau pour éviter que le vent ne la décoiffe. Il faisait beau. Tout était beau.

Le cocher chargea toutes ses caisses de bouteilles et reprit sa place. Il dit un mot à son cheval. Je compris «balayette» et souris à l'idée que l'animal ait démarré en entendant cela. Nous passâmes devant la mercerie. Tous ces rubans de couleurs, ces cols en dentelle, ces perles, ces boas de plumes soyeuses dans la vitrine me rappelaient les longs arrêts que je faisais ici avec Maman. Elle discutait des heures avec la propriétaire de la boutique, Miss Fallinton, tandis que je jouais à trier des boutons, des galons, des lacets, des écussons par couleurs et par tailles. J'avais six ans et jamais je n'aurais pensé à l'époque qu'un mois plus tard j'habiterais un orphelinat. Depuis, j'avais pris l'habitude de me forcer à ne jamais faire de projets. Je savais désormais que tout était fragile et que nous ne décidions pas grand-chose dans nos vies. Je préférais me laisser surprendre qu'essayer de réaliser mes rêves.
Comme je trouvais mon uniforme trop gris et très peu élégant, j'avais mis, avant de partir chez mon amie Margarita, la robe de demoiselle d'honneur que je portais au mariage de ses parents, Dawson et Aglaé. Mais soeur Ethelred m'avait obligée à l'ôter.
- Vous manquez de sobriété, Joy. Vous êtes invitée chez votre camarade, pas au bal, enfin !
Commenter  J’apprécie          90





Ont apprécié cette citation (5)voir plus




{* *}