Les riverains du fleuve Blessure sont de légendaires fouilleurs d’eau. Ils savent où pêcher le poisson chat et le silure ; ils connaissent les niches boueuses où vit la carpe noire aux écailles d’argent. Ils savent où trouver du poisson même lorsqu’il ne reste plus de poisson nulle part ailleurs.
(pages 11-12)
Elias avait souvent le vertige quand, à l’invitation de tante Fo, il restait quelques minutes au milieu des voluptueux parfums et des enivrantes senteurs qui traînaient dans le sillage de chaque geste, de chaque mouvement de ces femmes pleines de vie.
(pages 64-65)
Depuis toujours, les guerres des hommes prennent beaucoup de temps, avant de se conclure. Elles sont sans trêve. Elles sont cruelles et atroces. Mais les guerres des hommes finissent toujours, un jour ou l’autre. Parfois, les hommes se disputent la victoire, pendant un court moment. Puis, ils oublient qui a commencé, ils oublient qui a perdu. Et ils oublient même de faire la paix.
(page 77)
L’amour ne tue jamais. L’amour ne meurt jamais. L’amour coule à l’intérieur de nos rêves. Il s’enfouit dans notre chair ; se terre dans les mots que nous ne disons pas. Les histoires d’amour malheureuses ne brisent pas le cœur de la terre.
(page 119)
Les nations qui ne s’intéressent qu’à nous vendre des armes, peuvent-elles nous vouloir la paix ?
(page 106)
Les femmes savent toujours quand un homme les aime. Souvent, ce savoir fait leur malheur. Il peut les rendre amères et folles. Les femmes tirent rarement de la paix et du bonheur de se savoir aimées.
(pages 88-89)
Mais pas un bruit. Ni de voiture qui ronronne et cahote dans les nids de poule. Ni de mobylette chinoise au silencieux rouillé qui pétarade. Plus aucun bruit ne sourdait.
(page 29)
Doucement, le vent rouge s’est fondu dans le crépuscule cafardeux, qui planait à présent, sur ce qui reste de la ville. Lentement, le vent rouge s’est mué en brouillard humide qui tourbillonnait et faisait trembler de peur les habitants pris de court.
(page 51)
Elias pensa que la seule souffrance qui soit pire est celle de ne pouvoir sentir les parfums d’un corps de femme.
(page 17)
Ce jour était un jour qui ne ressemblera pas aux jours passés ni aux jours qui suivront ce jour du silence dont parlait le livre de Hâ.
Le livre dit :
" Les mots vous abandonneront à votre insu parce qu'ils se rendront compte de la misère et de la pauvreté de ce que vous leur faites dire. Les mots, un jour ne supporteront plus que vous mentiez par eux. Ils refuseront l'inutilité des services que vous leur demandez. Ils refuseront d'être complices de vos vanités et de vos mensonges. Ils ne voudront plus dire votre amour qui n'est pas de l'amour. De dire votre pardon qui n'est pas un pardon. Oui, les mots vous abandonneront pour toujours. Les mots s'en iront déçus et dégoutés de vous. Ils s'en iront et le jour su silence arrivera vers vous, à votre insu... "