Encyclopédie des nuisances

Une société est une « organisation de survie collective », par l’ « appropriation de la nature ». La notre a réussi dans son inconscience à « mettre en péril cette sécurité matérielle dont la conquête était sa seule justification » et a décrété « l’état d’urgence écologique », à la fois « économie de guerre, qui mobilise la production au service d’intérêts communs définis par l’État » et « guerre de l’économie contre la menace de mouvements de protestation qui en viennent à la critiquer sans détour ». Cet « écologisme » prévient et censure tout développement de la critique des nuisances en une critique de l’économie qui les engendre ».

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Aussi lapidaire que percutant. À côté de brillants exposés documentés et chiffrés, ce texte permet de poser des questions essentielles.



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Ce livre est le Catalogue 2014 des Éditions de l'Encyclopédie des Nuisances que mes libraires m'ont gentiment offert pour cause de doublon. En soi se faire offrir un catalogue d'édition n'est pas le plus chouette des cadeaux - certes, comme le dit l'adage, « à cheval donné, on ne regarde pas les dents » - mais ce n'est-là pas n'importe quel catalogue de n'importe quelle maison d'éditions : c'est celui de ces fameuses éditions prolongation de la revue du même nom et créée par Jaime Semprun, le fils de Jorge Semprun, et au catalogue desquelles on trouve des livres de George Orwell, Günther Anders, Lewis Mumford, Bernard Charbonneau, Walter Benjamin,Theodore Kaczynski,.. et de bien d'autres. Plutôt le genre d'auteurs qui aident à la pensée et poussent à s'interroger sur une certaine vision du monde.



Ce catalogue se présente en 3 parties distinctes :



- une reprise d'un article de la revue intitulé « ABÉCÉDAIRE » ;

- une présentation des livres au catalogue suivant pratiquement toujours le même format (sauf pour quelques livres dont Orwell) : une citation du livre, quelques phrases de présentation et des informations techniques (ISBN, prix, format, pages,...);

- des extraits de leurs correspondances avec des tiers.



L'article « ABÉCÉDAIRE» est des plus intéressants à plusieurs titres. Si je ne devais en retenir qu'un, cela serait sans doute le rappel de la définition d'un « alphabète » selon l'UNESCO, terme nettement moins usité que son négatif « analphabète ».



La partie constituant le catalogue proprement dit donne envie de lire tout ou partie des oeuvres que ces éditions proposent et cela dans une grande économie de mots.



Enfin, la partie correspondance est jubilatoire tant ils sont moqueurs dans leurs correspondances avec des auteurs, libraires, le Centre national des livres, des associations, … Ainsi pour expliquer un refus, le courrier électronique suivant est adressé : « Nous ne souhaitons bénéficier d'aucune sorte de promotion, ni comme « penseurs français en sciences sociales », ni par le bureau des livres d'un ambassade de France. Nous nous passerons donc de vos services. Vous trouverez certainement sans difficulté des auteurs plus accommodants, Michéa peut-être ? » - Et bim !, comme dirait ma fille - ou bien, en réponse à une lettre d'un auteur, la lettre suivante est adressée : « Notre réputation est un peu surfaite : il nous arrive de ne pas de ne pas frapper nos interlocuteurs et même de n'avoir pas l'invective à la bouche ; et nous sommes forts en faveur du dialogue lorsque sont réunies les conditions du dialogue » - Et rebim !, comme redirait ma fille. Pour paraphraser Ruddy Ricciotti paraphrasant lui-même Pierre Carles, les Éditions de l'encyclopédie des nuisances font la preuve que, si la correspondance est un sport de combat, ils en sont des champions.



En résumé, c'est un petit ouvrage à feuilleter avec plaisir et la preuve que l'on peut magnifier un banal catalogue. À défaut de le posséder dans sa bibliothèque, il est recommandé de posséder quelques oeuvres de ces éditions, en espérant que leurs exercices de nuisance restent vivants le plus longtemps.