page 163 [...] Le portier du "Golden Slipper" était un géant affable, rutilant dans un uniforme bleu, galonné sur toutes les coutures. Il accepta le dollar que Jerry Nason lui tendait, le fourra négligemment dans sa poche et :
- Parfaitement, monsieur, affirma-t-il, Mr. Raoul Julian se trouve bien ici.
Sam Duble tira Nason par la manche.
- Dites donc, mon vieux Jerry. Je préfère que vous y alliez seul. J'ai quelques scrupules à confier mon imperméable au vestiaire ... On n'apprécie plus les vieilles choses de nos jours.
- Entendu. D'ailleurs, je ne vais pas m'éterniser, répondit Nason en s'engageant sur l'épais tapis qui couvrait l'entrée du "Golden Slipper" qui est, comme on le sait, l'un des plus luxueux restaurants à la mode de New-York.
Nason tendit son pardessus et son chapeau à une gentille brunette qui les remit aussitôt entre les mains d'une non moins gentille blondinette. Il y avait foule devant la porte qui menait au bar et dans la grande salle de nombreux dineurs piétinaient, attendant qu'une table fût libre.
Nason s'approcha d'un maître d'hôtel qui gardait jalousement la porte et, prenant un air aussi important que s'il était propriétaire des plus grandes écuries de courses d'Amérique, il lui dit qu'il n'en avait que pour une minute. Et, devant l'air rébarbatif du maître d'hôtel, il ajouta :
- Je suis attendu par Mr. Julian.
- Mr. Raoul Julian ? s'enquit le maître d'hôtel.
- Parfaitement, Mr. Raoul Julian, confirma Nason.
Ce nom avait sans doute le même pouvoir magique que le fameux :"Sésame, ouvre-toi", car le maître d'hôtel s'effaça, soudain poli et obséquieux. [...]
L'avion 433 arriva avec vingt minutes d'avance à Maiquetía, l'aéroport moderne près de La Guaira, un palier aménagé par l'homme dans le flanc des montagnes du Venezuela, avant leur chute dans la mer.