Nous étions assis l'un à côté de l'autre. Sous cet ombrage, la chevelure blonde de la fillette pieds nus semblait hésiter entre l'or et le cuivre. Sa peau sur le dos ou à l'intérieur de son bras n'avait pas le même reflet. Et ce contraste était délicieux. Elle me regardait avec ses yeux qui savaient me voir "joli". Il n'y avait en elle aucune perversité, aucune coquetterie, aucune réserve.
La lune reste solitaire,
telle un écu blond,
enveloppant d'un papier d'argent
maisons, champs et récoltes,
Entrant pieds et orteils nus par ma fenêtre,
elle baise mon front
et par mes yeux ouverts
me pénètre jusqu'à l'âme
Il venait de voir quelque chose qui l'impressionnait. Une fille, avec un enfant pieds nus agrippé à sa jupe, et un nourrisson entre les bras, arrêtant les passants pour demander l'aumône.
Il alla vers elle, et sans dire un mot, bien plus honteux qu'elle-même, il lui mit dans la main le billet, dissimulé parmi quelques piécettes.
- A ton âge, on ne peut pas être mauvais, mon fils. Je ne suis même pas sûr qu'on puisse l'être à d'autres âges... En tout cas, pas au tien, non. On peut agir mal, c'est évident. Nous sommes tous pécheurs, et il est écrit que le juste lui-même tombe sept fois par jour. Mais tout ceci a pour cause bien plus la faiblesse que la malice. Nous, les hommes, sommes plus facilement juges que pères. Dieu, non. Quand il est venu nous apprendre à prier, il ne nous a pas recommandé de dire : "Notre Juge, qui êtes aux cieux", mais "Notre Père, qui êtes aux cieux". La preuve, c'est qu'il pardonne. As-tu vu un juge pardonner ? Les juges ne pardonnent pas ; les pères, oui (chapitre VIIII - page 77).
- La cause, c'est ce que nous défendons ou si tu veux : la justice. Écoute : suppose qu'il y a dix pommes pour dix enfants ; mais deux enfants ont huit pommes, et huit enfants ont deux pommes. Est-ce que cela te paraît juste ? Est-ce qu'il est juste qu'un enfant ait à manger quatre pommes, pendant qu'un autre enfant devra se contenter d'un quart de pomme ? Trouves-tu que cela soir juste ? ... Non, n'est-ce pas ? Eh bien, c'est ça la cause (chapitre XX - page 225).
- Écoute-moi bien, petit. Fais-toi moine dès que tu le pourras, car le mariage, c'est moi qui te le dis, c'est comme une ville assiégée. Me comprends-tu ?
- Je ne sais pas...
- Mais si, mais si. Écoute : tous ceux qui sont dehors désirent entrer, mais tous ceux qui sont dedans n'ont qu'une idée, en sortir (chapitre XIV - page 154).
Et il lui fit le récit circonstancié de son amoureuse aventure, depuis le premier jour. C'était un plaisir de conter ainsi dans la nuit, ayant à ses côtés quelqu'un que l'on aime et à qui on peut se confier. Frère Léon l'écouta comme il fallait, en silence ; mais un silence qui, de quelque manière, subtile mais sensible, était compréhensif, accueillant. Puis il lui donna de brefs conseils, recommandant la modération et la prudence.
- N'oublie pas, conclut-il, qu'en me rapportant cela, tu m'as compromis. Ne fais donc rien qui puisse faire de moi non plus un confident, mais un complice (chapitre XII - page 135).
Jamais, comme en ces jours, je n’avais pris une mesure aussi exacte de l’humanité.
Me promenant sur la terrasse, dans le crépuscule, j’enviais les oiseaux qui passaient haut, rapides, livrés aux soucis élémentaires de l’instinct. Plus tard, je contemplais les étoiles, indifférentes et glacées, témoins millénaires de la mesquine comédie des hommes. En bas, offrant à mes yeux le tapis resplendissant de ses lumières innombrables, s’étendait la Ville, théâtre de la cupidité, de la luxure et de l’hypocrisie (XXIV, page 183).
Ramonzona, dans ses continuelles frictions avec les garçons, avait toujours le dernier mot, et quoique personne ne l'avouât, l'arme par laquelle elle les dominait n'était autre que l'amour, et même la tendresse, aussi soigneusement recouverts qu'ils fussent par ce langage âpre et brutal, et cette irritation permanente, en fait toute apparente (chapitre IX).
Et il se mit à conter cette histoire où Rosa était le soleil, la lune, les étoiles, l'air qu'on respire, la sève de l'arbre, l'arôme de la fleur, la caresse de la brise, la musique du vent ... "Rosa, père ? ... Vous comprenez ?" (chapitre XI).