Les travailleurs indochinois sont acheminés vers Marseille, à partir de l’automne 1939. La très grande majorité appartient à la catégorie des « ouvriers non spécialisés » (ONS, traduit en vietnamien par Linh Tho, « soldats-ouvriers »). La plupart, issus de la paysannerie, ont été requis.
Des volontaires appartiennent à un milieu plus aisé et cultivé : les « interprètes » jouent un rôle d’encadrement. À leur arrivée à Marseille, « base de débarquement », tous sont hébergés dans les bâtiments de la future prison des Baumettes. On les distribue ensuite nationalement dans les établissements qui dépendent de la Défense nationale. C’est le cas, dans la région, des poudreries de Sorgues en Vaucluse et de Saint-Chamas dans les Bouches-du-Rhône.
Le 30 octobre 1918, à Marseille, la fille soumise Antoinette Sereni, née à Sartène en Corse, âgée de vingt ans, est l’enjeu d’une querelle entre proxénètes noirs. Son amant Cyprien Sodonou, originaire du Dahomey, embarqué comme navigateur, a confié la surveillance de sa maîtresse à son ami et compatriote Bernard Niamby.
Elle s’est pourtant placée successivement sous la protection de deux Martiniquais, Henri Aline puis Gilles Saint-Paul. Au retour du navigateur, une vive discussion a lieu, chez Sereni et en sa présence, entre l’ancien et le nouveau protecteur et leurs amis respectifs. Sodonou, prêt à céder, propose « d’abandonner le lendemain même la femme Sereni à son rival s’il la désirait ». Mais les deux Martiniquais les attaquent dans les terrains vagues derrière la Bourse, blessant mortellement la jeune fille et grièvement Pascal Straboni, un jeune Corse qui cheminait avec eux.
Lors du procès, H. Aline résume à sa manière les liens entre les trois principaux protagonistes de l’affaire et la jeune femme : « Elle n’a pas voulu accuser Sodonou qui était son amant, Saint-Paul qui était son “paillasson", c’est-à-dire son amant de cœur, et elle a trouvé tout naturel de m’accuser parce que je n’étais que “son cave", amant d’occasion ».