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Citation de MegGomar


« A l’hôpital, le médecin a extrait vingt-deux éclats de bambou de mon
corps. L’infirmière était si scandalisée par ce qui m’était arrivé qu’elle a
envoyé une lettre au journal municipal. Deux jours plus tard, une
photographie de moi couverte de pansements est parue dans le journal,
accompagnée d’un article sur le respect dû aux femmes. De nombreuses
personnes, surtout des femmes bien sûr, sont venues me rendre visite à
l’hôpital, avec des cadeaux de nourriture. Je n’ai lu cet article que des
semaines plus tard. J’y étais à tort décrite comme une épouse maltraitée
depuis longtemps. Je ne savais pas si on avait exagéré mon état parce qu’on
m’avait prise en pitié, ou si on avait voulu se venger au nom de toutes les
femmes maltraitées en mettant mon mari au banc des accusés.
— Vous avez demandé une rectification ?
— Non, j’étais désemparée, je ne savais pas que faire. C’était la première
fois de ma vie que je me trouvais dans le journal. D’ailleurs, au fond de
moi, j’éprouvais de la reconnaissance pour cet article. Si on s’était contenté
de penser que mon mari « mettait de l’ordre dans sa maison », comment les
choses pourraient-elles jamais s’améliorer pour les femmes ?
Un homme qui bat sa femme ou maltraite ses enfants, pour de nombreux
Chinois, « met de l’ordre dans sa maison ». Les paysannes âgées, surtout,
tolèrent ces pratiques. Ayant vécu sous la maxime chinoise, « une épouse
amère endure jusqu’à ce qu’elle devienne belle-mère », elles sont d’avis
que toutes les femmes devraient subir le même sort. C’est pour cette raison
que les gens qui avaient vu son mari battre Zhou Ting ne s’étaient pas
interposés pour lui porter secours.
Zhou Ting a poussé un soupir.
— Parfois, je pense que je ne m’en suis pas si mal tirée. Dans l’ancien
temps, il ne faisait pas bon être une femme. Je ne serais pas allée à l’école,
et je n’aurais eu pour toute nourriture que le riz que me laissait mon mari.
— Vous vous consolez facilement, ai-je dit en pensant à part moi que bien
des Chinoises se consolaient avec ce genre de réflexions.
— Mon mari dit que trop de savoir m’a gâtée.
— Il n’a pas trouvé ça tout seul. C’est Confucius qui dit que le manque de
talent chez une femme est une vertu. J’ai marqué une pause, puis lui ai
demandé : Par la suite, vous n’êtes pas apparue dans les journaux pour
tentative de meurtre ?
— Oui, je crois. Les journaux m’ont fait passer pour la méchante de
l’histoire et m’ont enseigné la puissance des médias. Depuis, personne ne
me croit quand je raconte ce qui s’est réellement passé. Ils pensent tous que
ce qui est imprimé dans le journal c’est la vérité.
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