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Citation de art-bsurde


Cependant, la limite entre reconnaissance et dénégation est ténue : on peut tout à fait reconnaître que le racisme existe sans se donner les moyens de lutter contre celui-ci, et occulter les racines profondes du racisme structurel. En effet, alors que le gouvernement français semble reconnaître l'islamophobie, sa politique sécuritaire participe grandement à la suspicion généralisée à l'encontre des présumés musulmans : appels demandant aux musulmans de se « désolidariser » des combattants de l'OEI, arsenal juridique sur l'apologie du terrorisme, extension des pouvoirs des services de police, mise en place de dispositifs contre la « radicalisation » à l'école publique et les services sociaux, instauration de l'état d'urgence (perquisitions et assignations à résidence dont la majorité semblent abusives). Ainsi, c'est le cadrage néolaïque qui s'est imposé pour interpréter la violence politique : au lieu de comprendre ses ressorts sociaux et politiques, elle est analysée comme les symptômes d'une « maladie de l'Islam », selon l'expression d'Abdelwahab Medded et d'Abdenour Bidar, dont la guérison résiderait dans l'administration d'un traitement de choc composé de cours de laïcité. Ce cadrage néolaïque est une forme particulièrement puissante de culturalisme, qui occulte les véritables sources de la violence politique : la politique étrangère des puissances de l'OTAN, et les inégalités sociales et raciales des sociétés occidentales.
De fait, la « communauté musulmane » est perçue comme un ensemble homogène et le terreau de la violence politique. Les mesures prises après les tueries de 2015 s'apparentent à des formes de punition collectives dans la mesure où cet ensemble d'outils juridiques et administratifs contribue à identifier et confondre toute forme de religiosité musulmane rigoriste ou simplement visible comme un « indicateur de radicalisation ». Le concept de « radicalisation », forgé en sociologie pour rendre compte de la polarisation et de l'élévation du niveau de violence (symbolique ou physique) dans les conflits politiques, est détourné de son sens initial par les marchands de l'expertise ès islam et terrorisme. […]
Plus largement, le mélange de préjugés et de référentiels à la scientificité plus que douteuse fait que le port du hijab, de la barbe, de robes longues, de bandeaux, le fait de prier, lire le Coran, devenir pointilleux sur l'alimentation, faire le jeûne, etc. sont perçus par de nombreux acteurs institutionnels, public ou privé, comme des signes avant-coureurs de la « radicalisation » et de la violence politique. Cette expertise contribue grandement à une confusion entre religiosité intense et menace sécuritaire.
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