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Citation de joellebooks


- Le standard.
- Quoi, le standard ?
- Il a explosé. Depuis votre intervention, ça n’arrête pas. Autant vous dire que les filles de l’accueil sont débordées. Mais c’est quelque chose.
- Les gens se plaignent ?
- Certains. Mais pas tous. C’est même une très faible partie des appels. Non, plein d’auditeurs, et surtout d’auditrices, tiennent à vous remercier d’avoir répondu à cette dame – celle dont vous avez lu la lettre. Sans parler des autres, qui souhaitent raconter leur propre histoire, vous demander conseil, savoir ce qu’elles doivent faire. Vous êtes visiblement la seule à pouvoir leur répondre. Sans compter le courrier. Regardez !
Philippe lui indique un sac de courrier bien remplie. Menie a l’habitude. Au journal, c’était pareil. Les gens s’ouvrent à elle, lui racontent leurs grands drames et leurs petits soucis. Tout le monde a besoin de ça. D’une oreille, sans jugement. De quelqu’un qui puisse tout entendre, qui puisse leur répondre qu’aucun vice, aucune douleur, aucune tragédie n’est solitaire. Quelqu’un qui explique aux femmes leurs corps, aux jeunes filles les réalités du couple, aux hommes les besoins de leurs épouses. On ne parle pas de ces choses-là, non. Ni chez les riches ni chez les pauvres. On se tait depuis si longtemps parce que c’est ainsi qu’on faisait autrefois, parce qu’on n’avait pas le choix et qu’il fallait bien vivre plutôt que de s’appesantir sur le chagrin de la disparition d’un frère, d’un père ou d’un fils. Parce qu’il fallait rester fort, forte, et ne pas se regarder le nombril. Mais il n’y aura plus de guerre. Aujourd’hui, on a le droit de s’écouter et d’écouter les autres.
Philippe frétille d’enthousiasme. Il a allumé un de ses gros cigares. L’air satisfait, il froisse quelques enveloppes. Il semble avoir pour Menie de grandes ambitions.
- Je pense sérieusement à une émission pour vous toute seule, Menie. L’équivalent de voter courrier des lecteurs mais à la radio, en direct. Vous imaginez ? Les auditeurs pourraient appeler, pour donner leur avis sur les lettres que vous auriez sélectionnées. Ça ressemblerait à une conversation. Ce serait très ludique, non ? Et surtout totalement inédit. Il faut trouver un titre, quelque chose de percutant. On a le temps d’y penser. Non, le plus important, c’est l’horaire. Que diriez-vous du matin ? Ou du soir, lorsqu’on peut s’adonner aux confidences ? C’est bien, ça. Le soir. On n’a pas grand-chose sur ce créneau-là.
- Non, pas le soir.
Elle pense déjà qu’une émission pour elle toute seule, qui n’y connaît rien, et que personne ne connaît, c’est une folie. Mais cette histoire d’horaire, non. Ça ne va pas.
- Et pourquoi donc ? s’étonne-t-il, guère convaincu.
- Parce que le soir, les maris et les enfants sont là. L’après-midi, c’est mieux. Les femmes sont seules chez elles. Elles en ont fini avec les tâches matinales, le déjeuner de leur époux. Les petits dorment. C’est leur seule pause. Et puis, elles seront sûres de ne pas être écoutées ou reconnues par leurs bonshommes qui seront au travail.
Philippe sourit, admiratif.
- On peut dire que vous connaissez votre sujet, Menie. Va pour l’après-midi, l’heure des femmes ! J’imagine que c’est un oui ?
- Pas du t…
- Parfait ! On va faire les affiches, une promotion de tous les diables. Personne ne vous connaît. Il faut vous construire un personnage. Pas trop dame patronnesse, ni trop bourgeoise. Une dame de confiance.
- Mais, je veux rester moi-même !
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