Article de Geneviève Jurgensen, La Croix, 20 mai 1994 :
Toulouse, 1987. Portrait de famille. Ingénieur, il enseigne à Sup-Aéro. Elle est professeur au lycée. Les filles, Émilie et Clémence, ont 14 et 12 ans. Leurs études marchent bien, elles aiment aussi les voyages, les vacances en Bretagne et les bandes d'amis. Elles grandissent, elles changent.
Une tumeur, apparue une nuit au bras de Clémence, va inciter Alain Le Pourhiet à tenir le journal qu'il publie aujourd'hui. L'issue en est, le 8 mars 1992, la mort de Clémence, chez elle. Quand, quelques semaines plus tard, son père décide de mettre un terme à son journal, il a l'impression de quitter sa fille une deuxième fois. Mais il sait aussi que ces pages ne reflètent pas seulement cinq ans de sa vie : elles représentent toute sa vie puisque "mon existence désormais n'aura plus de sens qu'à partir de là".
Cueille la nuit est un livre important, dont les qualités littéraires étonnent, naïvement sans doute, sous la plume d'un scientifique. Il explore les ressources de l'être humain devant une tâche à laquelle nul ne devrait jamais être attelé : sauver son entant quand, selon toute vraisemblance, il est perdu. Et pourtant, on le découvre avec l'auteur jour après jour, tout reste à sauver.
L'amour, bien sûr. L'amour pour l'enfant — et les annotations là sont si charmantes qu'on cherche qui, dans la littérature, aura jamais si bien peint les grâces de l'adolescence — mais aussi l'amour conjugal, filial, amical, confraternel.
Au-delà, ou plutôt dans l'amour aussi, il y a le secours de la culture. Ce qui vous a toujours nourri, chiner dans les brocantes, écouter de la musique, lire, continue d'opérer en vous, mais dans l'urgence. Un destin exceptionnel génère des réponses exceptionnelles.
La recherche de l'éternité, enfin. Elle s'installe en écho à une vie dont la brièveté condamne les proches à chercher d'autres dimensions. Et, grâce au livre, les lecteurs, qui ne peuvent qu'en être reconnaissants.
Alain, if you remember Quebec City 1968 Laval University and Nicholas, Jill, Peggy, I would love to hear from you. Chickupsjlm@gmail.com
Jill Malivoire
Ontario
Canada