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Citation de Partemps


C’est avec un pincement au coeur (plutôt gros que petit) que je me rends compte que le jour de prendre congé de vous est arrivé. En effet, je pars dans moins de deux semaines au Brésil, pays où j’a vécu, travaillé et milité pendant presque 13 ans et d’où est originaire ma compagne (nous nous sommes rencontrés à Paris en 1987 et ne nous sommes jamais quittés depuis). Je ne sais pas quand je rentrerai (ni si, à vrai dire…lol). Le fascisme, le vrai, le tatoué, à la fois grotesque et terrifiant (comme il avait raison, le père Brecht!) y est au pouvoir depuis 2018. Il voit, certes, se dresser contre lui tout ce que le pays compte de démocrates – y compris une partie de la bourgeoisie -, mais nous savons tous qu’il n’y a rien de plus dangereux qu’une bête blessée. J’ai donc décidé – contre l’avis des camarades sur place, lesquels, prenant en compte tant le danger lié à la répression accrue qu’au Covid19 pas du tout jugulé dans un pays où 18% à peine de la population est vaccinée, m’ont exhorté à ne pas m’y rendre pour le moment – que ma place est (plus encore qu’en 2019, plus que jamais même) à leurs côtés, et nulle par ailleurs. Je ferai cinq longs séjours dans des campements de paysans sans terre situés dans quatre états différents et deux autres, assez fournis en activités militantes aussi, chez les Yanomamis et les Guajajaras. Tout est déjà organisé et planifié, j’espère pouvoir au mieux contribuer, dans la mesure de mes modestes moyens, à la victoire de notre cause commune – devoir de tout militant internationaliste.

Nous avons, je le crois vraiment, passé de bons moments ensemble, parfois même bien plus que cela – si je n’en dis pas davantage c’est parce que la sentimentalité à deux sous n’est absolument pas la spécialité de la maison. Pour ces échanges (et ils ne furent ni rares, ni pauvres), je vous remercie à toustes, du fond du coeur. Twitter a toujours été pour moi ce qu’il se doit d’être, ni plus ni moins, à savoir un réseau social au sens plein du terme, ni confessionnal, ni table de dissection, ni divan de psychanalyste, et encore moins une juxtaposition de sous-groupes, sous-familles et sous-coteries, mais un ensemble d’une incroyable diversité et richesse permettant à chacun de butiner comme il l’entend et de piocher dans ce qui semble le plus proche. J’ai toujours tenu à partager avec TOUS ce qui, à mon sens, appartient au domaine public (mes lectures, mes écrits, mes engagements – qu’ils soient politiques ou autres -, mes coups de coeur touchant à la littérature, à l’art, au cinéma, à la musique, aux voyages – et mes détestations itou), en écartant soigneusement ce qui relève du domaine strictement privé, lequel n’a pas, à mon sens, pas sa place sur Twitter, du moins sur nos TL. C’est comme cela que j’ai toujours fonctionné, tout en comprenant parfaitement qu’il puisse y avoir d’autres manières d’envisager les choses, ce que j’accepte tout à fait. Nous ne nous sommes, bien entendu, tous connus physiquement, et compte tenu de l’extraordinaire variété humaine du bloc d’abonné(e)s, nous ne nous serions peut-être pas tous aimés en avançant dans la connaissance. Ce que je sais, c’est que j’ai toujours traité tout le monde (sauf les fafs, les rouges-bruns et les néolibéraux intégristes) avec un respect où l’affect eut souvent sa place – la réciproque étant, dans l’immense majorité des cas, pleinement vraie aussi, et c’est ce qui compte.

Il m’arrive d’évoquer la citation du Che à propos d’un récit de Jack London qui lui revint un jour à l’esprit « où le héros, appuyé sur un tronc d’arbre, s’apprête à finir dignement sa vie ». Pour des raisons, non pas religieuses, mais éthiques et, disons-le comme cela, également politiques, je me suis toujours tenu aussi loin que faire ce peut de l’idée du suicide (alors que je peux la comprendre chez autrui, pour autant qu’on puisse comprendre l’acte le plus personnel, le plus intime touchant un être humain, acte qu’à mon sens l’on peut encore moins « expliquer »), et c’est plus que jamais le cas. Mais je pense aussi qu’il y a une grande différence entre « se suicider » et « finir dignement sa vie », surtout à mon âge. Je n’ai rien d’un héros, mais s’il m’est arrivé, quand ce fut nécessaire, d’être assez courageux, il conviendra cette année de remplacer « courageux » par « téméraire », attribut s’appliquant à celle ou celui qui ne se soustrait pas à son destin, seule chose au monde à laquelle je crois, alors que ce n’est le cas ni de cette puissance « supérieure », toute puissante et omnisciente (quel que puisse être le nom qu’on lui donne), ni du hasard, fût-il « objectif ».

Nous resterons connectés, mais relativement peu, soit parce que, pour d’évidentes raisons, il y a plein d’endroits où je me trouverai sans connexion, soit parce que, même là où j’en disposerai, je n’aurai pas toujours le temps d’en profiter.

En attendant, je vous souhaite le meilleur et, surtout, la paix du dedans, avec soi-même comme avec le monde, seule permettant, tout à la fois, d’essayer de l’accepter et d’oeuvrer à la changer.

Que Dame Fortune vous accompagne!
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