AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Partemps


« L’amitié, ce rapport sans dépendance, sans épisode et où entre cependant toute la simplicité de la vie, passe par la reconnaissance de l’étrangeté commune qui ne nous permet pas de parler de nos amis, mais seulement de leur parler, non d’en faire un thème de conversations (ou d’articles), mais le mouvement de l’entente où, nous parlant, ils réservent, même dans la plus grande familiarité, la distance infinie, cette séparation fondamentale à partir de laquelle ce qui sépare devient rapport. Ici, la discrétion n’est pas dans le simple refus de faire état de confidences (comme cela serait grossier, même d’y songer), mais elle est l’intervalle, le pur intervalle qui, de moi à cet autrui qu’est un ami, mesure tout ce qu’il y a entre nous, l’interruption d’être qui ne m’autorise jamais à disposer de lui, ni de mon savoir sur lui (fût-ce pour le louer) et qui, loin d’empêcher toute communication, nous rapporte l’un à l’autre dans la différence et parfois le silence de la parole.

Il est vrai que cette discrétion devient, à un certain moment, la fissure de la mort. Je pourrais m’imaginer qu’en un sens, rien n’est changé: dans ce « secret » entre nous capable de prendre place, sans l’interrompre, dans la continuité du discours, il y avait déjà, du temps où nous étions en présence l’un de l’autre, cette présence imminente, quoique tacite, de la discrétion finale, et c’est à partir d’elle que s’affirmait calmement la précaution des paroles amicales. Paroles d’une rive à l’autre, parole répondant à quelqu’un qui parle de l’autre bord et où voudrait s’accomplir, dès notre vie, la démesure du mouvement de mourir. »

(Maurice Blanchot: L’amitié)
Commenter  J’apprécie          10









{* *}