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Citations de Alberto Ruy Sánchez (23)


Ce n'est pas que je déteste la vieillesse, mais il n'est pas facile d'admettre que, tôt ou tard, apparaît sur notre visage ce que nous portons en nous-mêmes, ce que nous sommes en profondeur. Non, ce n'est pas toujours facile. p 46 grand-père Amado
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Sur l'une des collines qui entourent Mogador au nord-est, une femme a semé des plantes appelées "esclaves de l'arc-en-ciel". Elles donnent des fleurs aux pétales brillants, qui sont l'une des plus belles visions qu'aient eues certains mystiques de religions diverses. Mais elles ne durent qu'un jour et meurent. Toutefois, si l'on retire pendant la nuit les feuilles et les fleurs fanées, la plante donne une autre fleur le lendemain, d'une couleur différente. Les gens se font une fête de les planter, puis ne tardent pas à les négliger, lassés de tous les soins qu'elles exigent, et les plantes meurent. Cette femme, quis'appelle Lalla, a semé ces fleurs, à peu de distance l'une de l'autre, sur un coteau long de plus de cent mètres, oú elles font un tapis de couleurs éblouissantes, et a décidé de devenir leur esclave.
"Eh bien, je ne serai qu'une esclave de l'arc-en-ciel de plus", déclare-t-elle, jouant avec le nom de ces fleurs pour se moquer de ceux qui lui reprochent de se donner tout ce travail, et elle s'habille chaque jour d'une couleur différente, pour ne pas détonner avec la nuance dominante de son parterre. p 131-132
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Près de la source, à l'endroit où Hassiba s'était levée pour partir en courant, se dressait une stèle en pierre d'apparence millénaire. L'un de ses côtés était couvert d'une inscription... :
"Entre. Ceci est le jardin où le corps se meut dans le vent comme les plantes qui naissent de la terre. Où les sens s'épanouissent. Où la voûte du ciel et les figures stellaires forment le toit qui veille sur le vol du pollen des songes, quand ceux-ci parviennent à échapper à leurs reflets dans les bassins. Entre."
Il n'y avait pas de porte derrière la stèle, mais un sentier ondoyant qui se perdait dans l'épaisseur du feuillage des grands arbustes aux odeurs pénétrantes. p 41
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Dehors, la rumeur des eaux fait chanter les galets, embrasse les rochers et bat le tambour des murailles de la ville. La rumeur grandit et en grandissant vient le caresser.
Il a retenu son souffle pour ne pas perturber la course de son calame. Comme son métier l'exige. Il doit prévoir à l'instant où il interrompra le trait pour reprendre son souffle et retremper la plume de roseau dans l'encrier. Il retient sa respiration tandis que sa main progresse. Mais il n'a pas pu prévoir que l'air chargé d'embruns allait véhiculer jusqu'à sa peau l'haleine de chaque vague. La mer ne cesse d'affluer à sa fenêtre. Cette fois, elle le trouble. L'émeut. Son oreille n'est plus que la plage rongée par un chant salin.
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Epigraphe :
Ton rêve dormira dans mes mains
marqué par les lignes de mon destin.
Vicente Huidobro

Si dans ton rêve l'eau te recouvre,
danse avec elle.
Si tu te réveilles entre ses lèvres,
c'est que tu as rapporté du rêve
le suc de l'amour.
Fais-lui une place dans ta vie
et plus jamais tu n'auras soif.
Principe Soufi
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"Quand nous étions encore des enfants avides de contes anciens et nouveaux, elle nous réunissait sous un grenadier, là, dehors. Et je t’assure qu’une fois lancée dans un récit, même le vent s’arrêtait pour l’écouter. Elle ouvrait un trou dans le temps, comme si une seconde se changeait soudain en un fruit mûr ouvert en deux, et la saveur de ses paroles nous attirait dans cet espace appétissant. Peu importait l’heure qu’il était. Elle devenait reine du temps. " p 51
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DANS LA LUMIÈRE, UN VIDE
À Mogador l'inaccessible, à la ville oubliée de Mogador, on arrivait seulement par voie de mer. C'est au rythme lent de la vague douce que l'oeil peut accueillir l'éclat de la pierre blanche de ses murailles, m'a-t-on dit maintes fois, et en termes différents. Ainsi Mogador m'est-elle apparue sur le miroir de la mer, chaque granulation de ses pierres lestée de son depôt de soleil, quand la lumière, en ses jeux aveuglants, semble décider pour celui qui vient du moment et du mode de l'approche. La luminosité du jour, à son comble, bridait tout contact heurté et le plus lent va-et-vient des eaux incitait par sa douceur au rapprochement. p 168
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Le contrat suivant m'a conduit à Carthagène. Je me rends compte à présent que Carthagène des Indes et Mogador sont des villes jumelles. Leurs murailles créent dans la ville un bouillonnement, changent les rues en veines chaudes. Elles sont semblables à l'écume, leurs horizons engloutissent le soleil, elles conservent le souvenir des canons des corsaires, des femmes aux mouvements de mer, des hommes excités qui dansent au son des tambours pour affirmer leur séduction ; toutes deux ont une haleine salée, une moiteur nocturne, une odeur de sexe. Elles sont les songes fortifiés d'hommes en proie au délire, au rythme, à l'insomnie. p 101
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Cuando se mira de esa manera, el horizonte no existe, lo fija la mirada, es un hilo que se rompe a cada parpadeo .

Ella miraba fijamente la línea que el cielo y el mar comparten durante el día, la orilla que pierden cuando llega la noche a unir en secreto todas las telas. Ya en la obscuridad, era una línea de estrellas la que sus ojos fijaban, una línea clara reflejada a lo lejos sobre el agua.

Ni el vuelo de los insectos sobre sus párpados podía cortar los hilos extendidos por su mirada: nada hacía de sus pestañas inquietas alas.
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Par cette nuit de pleine lune, Hassan, le plus grand calligraphe de Mogador, faisait un nouveau voyage. la voix de l'eau montant vers le ciel chantait à son oreille une longue et aventureuse histoire qui révélait comment la mélancolie était arrivée à Mogador.
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On pouvait presque voir la sécheresse de l'air. Cet après-midi-là, sur les côtes de Berbérie, sur la ville fortifiée de Mogador, l'automne s'annonçait dans le vent. Ses souffles invisibles, longs et secs, filant comme des serpents furieux entres les récifs, tiraient de ces pierres rongées le bruit d'une déchirure.
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Je viens porté par mon sang. Par sa musique.
Je viens guidé par ma langue. Par sa soif.
Tous les jours je me vêts de vents, de marées, de lunes.
Et ici, quand on m'écoute, de tout cela je me dévêts.
Je ne suis que le souffle de ce que je conte. Une voix somnambule.
Une voix bouleversée cherchant l'intimité de la terre.
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C'est l'heure où, à Modagor, le soleil prend les amants par surprise. Il n'interrompt pas leurs baisers inassoupis, il les illumine. L'élan amoureux qui les lie depuis la nuit par le baiser est un lien invisible, fil d'air qui, sans jamais se rompre, les confond, fait d'eux un seul et mille corps à la fois.
Ils s'aiment minutieusement de leurs yeux affamés, de leurs bras d'eau vive, des doigts de leur langue, d eleur folle pituitaire insatiable. Leurs lèvres à vif ont réponse à tout et révèlent totu sans le dire.
Ils ne savent plus depuis quand ils s'explorent sans trève, se délectent l'un de l'autre, se reconnaissent, ne se reconnaissent plus, se reconnaissent tels qu'ils ne se sont encore jamais reconnus. Leurs baisers scandent les durées intérieures, les éons de leurs corps aux milliers de pores entrouverts, aux milliers de bras, de jambes, de doigts entrelacés ; les baisers et quelques paroles tressées avec ardeur, calligraphies doucement formées d'un seul trait sûr. De leur peau émanent les feux fuyants de l'amour.
Le soleil cadence une autre durée, extérieure, celle de la révolution du globe, des instruments et des machines qui marquent les heures, mais aussi celle du mouvement des planètes, de l'attraction mutuelle des amants changés en pierre d'aimant, quand l'un devient la pleine lune de l'autre et sa plus grande marée.
La lumière du soleil qui peu à peu les atteint cède à leur peau un surcroit de chaleur, de volubilité, imprime à leurs lèvres un sourire renouvelé et leur souffle à l'oreille que la nuit, leur nuit, n'est pas finie. Elle est passée dans leur peau avec chaque mouvement de leurs hanches ; ils l'ont poussée dans l'orifice où elle est restée, ombre épaisse et lisse, très noire, sous le suc luisant qui les unit et d'où elle ne veut plus sortir. Elle bat au rythme de leur sang, respire par leurs plis.


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C'est pourquoi les ciels de Mogador sont considérés comme des entités quasi inconcevables mais représentées par des êtres qui sont autant d'échos de l'eau, de la terre, de l'air et du feu, aussi longtemps qu'ils se désirent, s'attirent et se repoussent. La musique des sphères est à Mogador musique du désir.
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La première chose à faire pour tâcher de comprendre le désir d'une femme, c'est, il me semble, de mettre la main sur elle – certes, on touche d'abord quelqu'un du regard, de la voix, et par d'autres moyens mis en jeu pour entrer en contact avec sa peau, chose simple, pourrait-on croire, mais en fait très compliquée, parce qui sait où commence exactement la peau d'une femme et où elle finit vu qu'elle s'étend et se rétracte de manière telle que pour les uns elle passe inaperçue, et pour les autres demeure un mystère.
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Pour diverses raisons et déraisons, on l'appelle aussi "La ville des désirs". On croit qu'elle a été créée par des marins en quête d'un port en eau calme. Ou par ceux qui naviguent sur l'autre mer de Mogador, celle de sable : les caravaniers qui traversent le Sahara et désirent ardemment, eux aussi, un havre où se remettre de leurs épreuves. Elle a ainsi été présente dans l'esprit et les sens des navigateurs du sel et du sable bien avant d'être là où l'on peut la voir à présent. Encore que, même à présent, quand on va vers elle, pendant la longue traversée des eaux ou des dunes, on la réinvente .
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En arabe, khamsa signifie cinq. Les cinq doigts de la main de Fatma, la fille du prophète, protectrice symbolique des fidèles.
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Même le vol des insectes sur ses paupières ne pouvait rompre les fils tendus par son regard : rien ne faisait de ses paupières des ailes inquiètes.
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Une fois encore je me suis posé sérieusement la question : qu'est-ce qu'un texte ardent ? En quoi peut bien consister la chaleur des mots, et à quoi tient la sensualité de ce qu'on écrit ? Comme j'ai toujours été quelqu'un qui se laisse davantage guider par ses obsessions que par la discipline, la question réapparaissait tel un oiseau migrateur, une pluie tropicale en fin d'après-midi, ou l'une de ces difficultés sur lesquelles on ne manque jamais de buter.
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Ce matin, j'étais en face d'un jaguar au zoo de Chiapas.
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