Dans la biographie fictive que chacun de nous reconstruit pour son usage et sa consommation personnelle afin de donner un sens à son destin, la rampe d'escalier qui séparait le bureau du directeur de la salle de classe était devenue une pierre milliaire. A des décennies de distance, il ressentait la joie qui avait suivi son désarroi, l'euphorie affolée de celui qui, arraché prématurément à l'adolescence, est précipité de force dans l'âge adulte.
Dans cet escalier Giorgo Zevi était devenu grand. Il avait quinze ans. Il était seul, il devait s'en sortir tout seul, personne ne lui dirait plus ce qu'il devait ou ne devait pas faire.