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Citation de Letempodeslivres


Par bonheur, ils avaient peu de famille et peu d’amis. Ils eurent néanmoins à endurer des visites dont la politesse ne parvint pas à masquer la consternation. Énide observait le visage de ceux qui découvraient son petit ; chaque fois qu’elle constatait le tressaillement de dégoût, elle était au supplice. Après un silence crucifiant, les gens finissaient par hasarder un commentaire d’une maladresse variable : « C’est le portrait de son arrière-grand-père sur son lit de mort. » Ou : « Drôle de tête ! Enfin, pour un garçon, ce n’est pas grave. »
Le sommet fut atteint par la méchante tante Épziba :
– Ma pauvre Énide, tu te remets ?
– Oui. La césarienne s’est bien passée.
– Non, je veux dire, tu te remets d’avoir un gosse aussi vilain ?
Vaincus, les parents regagnèrent leur domicile où ils se cloîtrèrent.
– Mon chéri, dit la mère à Honorat, jure-moi que nous ne recevrons plus personne.
– Je te le jure, mon amour.
– J’espère que Déodat n’a rien capté du fiel et de la médisance de tous ces gens. Tu sais, il est si gentil. Il a essayé de me téter le sein et quand il a vu qu’il n’y arrivait pas, il m’a souri, comme pour me dire que ça n’avait pas d’importance.
« Elle est en train de perdre la raison », pensa le père. Énide avait toujours été d’une extrême fragilité, tant physique que psychologique. À quinze ans, elle avait été renvoyée de l’école des petits rats de l’Opéra de Paris pour un motif inconnu dans l’histoire de cette auguste maison : excès de maigreur. « Nous ne savions pas que c’était possible », avait conclu l’examinatrice.
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