AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

5/5 (sur 2 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Montauban , le 07/12/1918
Mort(e) à : La Roche-sur-Yon , le 23/06/1996
Biographie :

Théologien et pasteur, il a enseigné la philosophie et l'éthique à la faculté de théologie protestante de Paris. Il est membre du comité d'honneur du Secours populaire français et du Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP).

Ajouter des informations
Bibliographie de André Dumas (II)   (6)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Puissances et Impuissances


Notre Dieu, les mots pouvoir et puissance nous
font peur. Nous ne connaissons que trop les
oppressions qu’ils entraînent, cette classification et
détermination, qui font les uns informés, compétents,
légitimement dominants, et les autres ignorants,
incompétents, légitimement dominés. Nous ne nous
contentons pas des corrections, que l’on peut
apporter à ce schéma, à savoir que ceux qui
dominent le font au service de ceux qui sont
dominés et que ceux qui sont dominés reconnaissent
les bénéfices qu’ils retirent d’un tel service.


Oh Dieu, ces seuls mots “pouvoir” et
“puissance” nous rendent malades. Nous n’en
pouvons plus de subir les hiérarchies et de devoir en
plus les remercier. Nous n’en pouvons plus de naître
et de vivre dans ce qui apparaît la seconde zone de
la terre. Nous n’en pouvons plus d’être, là-bas, du
Tiers-Monde, et de subir la domination européenne,
américaine et soviétique. Nous n’en pouvons plus
d’être, ici, le quart-monde et de subir la domination
des naissances et des diplômes, des grandes familles
et des vielles traditions, des nouvelles aristocraties
technocratiques et de leurs explications péremptoires.
Oh Dieu ! Nous n’en pouvons plus d’être moins
égaux que les autres, humainement, même si l’on
nous appelle frères et soeurs, spirituellement. Nous
n’en pouvons plus de ce partage des classes, qui
court silencieusement entre nous. N’étais-tu pas venu
pour créer la fraternité en abolissant l’inégalité et en
donnant à tous la liberté ? Ton Evangile est-il
seulement un arôme ou vraiment un levain ?


Mais, ô Dieu, nous ne te disons jamais cela par
jalousie humaine, ni par rancoeur sociale, dans
l’espoir qu’un jour nous aussi nous deviendrions
puissants et que nous saurions alors prendre notre
revanche sur ceux qui nous ont si longtemps, et
parfois si gentiment, si naturellement , dominés,
exploités, expliqués, enrobés dans leur suprématie
naturelle. Nous le savons, ô Dieu, tout homme est
pêcheur, même parmi les dominés. Tout homme est
faible et fragile, même parmi les dominants.


Ô Dieu, combats en chacun de nous le goût du
pouvoir. Apprends à chacun de nous la réalité de sa
fragilité. Délivre-nous de l’ivresse de la puissance et
surtout délivre-nous du sentiment de l’impuissance.
tu nous a tous faits pour avoir part au pouvoir et
pour en éviter les pièges.

Ô Dieu, abats ceux qui se croient puissants et
relève ceux qui se croient impuissants, comme l’a
prophétisé la jeune femme Marie, qui, par la foi, a
été la mère de ton fils unique sur la terre.


Au nom de Jésus-Christ, qui a connu ici-bas la
totale impuissance pour recevoir la totale puissance
sur la terre et dans les cieux, et pour donner à tous
la puissance également partagée de son Saint-Esprit.
Amen.
Commenter  J’apprécie          00
André Dumas (II)
Te parler ne me gêne pas



Je ne me gêne pas pour te parler. J’en ai fini avec
l’hésitation de la démarche trop prétentieuse ou du
recours inutile. Je ne me gêne pas, car tu as du
temps pour la vérité, de la bonté pour la réalité, de
la force pour la vie. Tu ne demandes pas que l’on
soit intéressant à tes yeux, ni capable à nos yeux. Tu
n’as jamais intimidé, même quand tu as parlé dans la
colère et que tu t’es tu dans la douleur. Tu donnes
de la hardiesse, puisque tu ne regardes pas aux
apparences et que tu sais de quoi nous sommes
faits.


Je ne me gêne pas de te raconter mes tentations,
ni mes obsessions, car elles sont chair de ma vie. Je
ne les souhaitais pas et elles ont fondu sur moi, au
moment même où je me croyais maître de mes goûts
et de mes entreprises. Elles sont venues par derrière
et elles se sont installées, comme si je les avais
invitées. Je ne me gêne pas de te les dire, parce que
tu sais endiguer la marée noire des regrets vains et
que ton pardon passe comme un soleil, là même où
nos passions sont passées comme un torrent.


Je ne me gêne pas de te raconter mes désirs et
mes projets, car ils sont chair de ma vie. Je ne suis
pas sûr de pouvoir vivre à leur hauteur, car les
autres attendent de moi, plus que je n’attends de
moi-même. Je ne sais pas si je retrouverai le souffle
d’entreprendre et de mener à bien. Mais ton fils lui
aussi a désiré et projeté sans trêve, tant qu’il a fait
jour, et il a, à la fin, remis son souffle entre tes
mains.


Je ne me gêne pas de te raconter mes angoisses,
quand je perds pied en moi-même et que le sol
chavire dans un ébranlement sans cause. Je les
ressens comme des puissances étrangères, dont la familiarité m’effraie. Je leur en veux de m’en vouloir
et je ne comprends pas pourquoi c’est à moi qu’elles
se collent, comme si je n’étais plus moi. Car tu as dit
que la vie est un combat “ au milieu des adversaires
nombreux” (Psaume 3,2) et tu as dit aussi : “tu ne
craindras ni la terreur de la nuit, ni la flèche qui vole
au grand jour, ni la peste qui rôde dans l’ombre, ni
le fléau qui ravage en plein midi” (Psaume 91, 5-6).


Je ne me gêne pas de te raconter mes curiosités,
car tu as fait le monde multiple et l’homme
débrouillard. Tu as disposé la diversité à la surface
de l’univers et tu as aménagé des secrets pour que
nous les découvrions. Tu nous as donné de l’appétit
et de la vie en abondance.



Je ne me gêne pas de te raconter ma vie car tu es
comme nous : avec une seule bouche, mais deux
oreilles, avec un seul visage, mais de multiples
entrailles de miséricorde. Amen.
Commenter  J’apprécie          00
André Dumas (II)
L'enthousiasme et le dérisoire




Notre Dieu, tu aimes les enthousiastes, ceux qui
s'enflamment et saisissent chaque matin leur vie
comme un grand filet où tout fait ventre, ceux qui
voient clair dans ce qu'il faut faire et dire, ceux qui
vibrent au journal comme à la Bible, ceux qui
donnent de l'allant à la quotidienneté, si bien qu'elle
en devient pittoresque et saisissante, tous ceux qui
multiplient, spontanément, la saveur, la couleur et
l'odeur du monde.

Mais, ô notre Dieu, pourquoi n'aimerais-tu
pareillement ceux qui, tout aussi spontanément,
murmurent l'inquiétude et l'hésitation, parce que tu
leur as donné capacité de voir à la fois l'endroit et
l'envers de tout ce qui est, ceux que tente la voix
silencieuse du dérisoire que dans ta bonté tu veux
bien appeler prudence, sobriété et peut-être sagesse.

Car, tu le sais aussi bien que nous, les
enthousiastes, eux aussi, sont peuplés de démons,
dont ils ne veulent pas faire l'aveu : le démon de la
colère, qu'ils croient sainte et le démon de leur
vitalité, qu'ils confondent avec la tienne, le démon
de l'exaltation, qui les installe dans la tribune et le
démon de l'énergie, qui épuise les autres, avant de
les épuiser eux-mêmes. Moïse était énergique et son
beau-père, le païen Jethro, a dû lui conseiller d'en
faire moins et de ne pas demeurer puissant et
solitaire (Exode 18,18). Saint Pierre était
enthousiaste et Jésus a dû le rassurer trois fois après
qu'il ait chuté dans son triple reniement (Jean
21, 17).

Notre Dieu, pardonne aux enthousiastes, qui ne
savent pas assez fortifier leurs frères, indécis, et pas
assez renouveler leurs forces, épuisables. Ne leur en
veux pas, mais pardonne-leur, pour que leur feu
brûle, sans ravager le terrain et sans s'effondrer en
cendres, toi qui t'es symbolisé dans "le buisson de
feu, qui n'était pas dévoré par le feu" (Exode 3,2).


Notre Dieu, pardonne à ceux que ronge la lèpre
du dérisoire. Donne leur la force de se combattre
eux-mêmes, sans se haïr. Donne leur une cuirasse
intérieure, pour qu'ils cessent de se déprécier, en
confondant la santé de l'humilité avec la maladie de
la critique. Donne leur un armement extérieur, afin
qu'ils découvrent et qu'ils pratiquent la force et la
joie de la conviction, de la convocation et du
combat.

Notre Dieu, pourquoi parlons nous de ces deux
races d'hommes, comme si elles étaient races
antagonistes et étrangères l'une à l'autre, alors que
chacune de nous oscille de l'une à l'autre, selon les
moments de sa vie. Nous ne te demandons pas de
nous supprimer les oscillations. Nous te demandons,
au milieu de chacune d'entre elles, de ne pas perdre
le nord. Car tu ne mets pas à l'abri des tentations,
mais, dans les tentations, tu es celui qui peut nous
délivrer du mal, le double mal de l'enthousiasme
meurtrier et fragile, et du dérisoire, silencieux et
anéantissant. Dans la violence de nos passions
opposées, viens donc mettre l'opposition de ta
passion recréatrice. Amen.
Commenter  J’apprécie          00
Ivresse légère



Notre Dieu, c’est entendu, il ne faut pas
confondre le vent de Pentecôte avec les effets du vin
doux (Actes 2, 13). C’est entendu, la société vaut
mieux que l’ivresse et tu n’as jamais souhaité que
nous confondions la drogue avec la foi.

Mais il est pourtant bon de vivre parfois en légère
ivresse, de perdre son quant à soi et sa timidité,
d’oublier sa trop rigide identité, de voguer de
tendresse en allégresse. Il est bon de confondre le
jour et la nuit, de recevoir un coup de lune en
plein soleil, de se baigner à minuit comme à midi. Il
est bon de dire des bêtises sensées et d’inventer des
étourderies. Il est bon de danser au rythme du corps
et du coeur. Oui il est bon d’être un peu ivre,
comme ton apôtre Saint Paul l’était aux yeux
sourcilleux des paroissiens de Corinthe : “Ah! si
vous pouviez supporter de moi un peu de folie, eh
ben oui ! supportez-moi ! (II Corinthiens 11,1)

Car, notre Dieu, tout est bon dont nous pouvons
nous réjouir en remerciant. Tout est bon qui fait
briller les yeux, plisser les joues, agiter les mèches.
Tout est bon qui donne à ta création son allure de
fête et qui de ta création nous institue convives. Tout
est bon, quand je perds la tête car j’ai trouvé ma joie.

Nous te demandons l’ivresse légère, qui nous
transporte en ballon jusqu’au ciel de tes
annonciations et de tes bénédictions. Nous te
demandons de pouvoir en garder le délice du
souvenir, quand nous sommes revenus au réveil du
petit matin dégrisés. Nous te demandons cette légère
ivresse pour tous ceux qui nous entourent, dans
notre famille et chez nos amis, dans notre travail et
chez nos voisins, dans notre paroisse et chez nos
“coreligionnaires”, dans notre monde et parmi les
nations, afin que l’on sente, quand même, que tu
nous donnes le pain, mais aussi le vin, la tâche mais
aussi la joie, la foi mais aussi l’ivresse.

Car c’est par l’ivresse de ta folie que tu as créé,
que tu as sauvé et que tu accompliras le monde.
Amen.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de André Dumas (II) (6)Voir plus

Quiz Voir plus

Victor Hugo contre le reste du monde

Les misérables

Victor Hugo
Non

10 questions
49 lecteurs ont répondu
Thèmes : tribuCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *}