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Citation de Cielvariable


À leur rencontre, l'un et l'autre émergeaient des cendres froides de mariages ratés. Âgé de trente ans, Tom en avait six de moins que Pat et avait déjà connu deux unions de courte durée ; quant à elle, elle tentait d'en oublier une qui lui avait donné l'impression d'un piège étouffant. Tous deux avaient toujours rêvé du parfait amour et, contre toute attente, ils semblaient l'avoir trouvé l'un avec l'autre bien que, au moins en apparence, ils n'aient en commun qu'une puissante passion sexuelle.

Tom était fort comme un bœuf, et Pat menue et fragile, souvent malade. Il était maréchal-ferrant, elle n'aimait que les travaux manuels délicats, tels que la broderie et la peinture. Il était allé à l'université, alors qu'elle avait interrompu ses études secondaires pour se marier une première fois. Il était calme et apaisant quand elle semblait parfois anxieuse, craintive.

Peu importait. Il n'avait qu'à lui ouvrir les bras pour qu'elle vienne se réfugier au creux de sa force. Il lui disait toujours :

— N'oublie pas, chaton, « tout vient à point à qui sait attendre », et pour moi rien ne passe avant toi. Je t'aime plus que tout au monde.

À quoi elle répondait de sa voix de petite fille, malgré ses trente-six ans :

— Je t'aime, mon chaton. Je t'aime.

Pat Taylor connaissait Tom depuis des années avant de « sortir » avec lui. À l'instar de sa famille - ses parents, le colonel en retraite Clifford Radcliffe et sa femme, Maggy ; ses enfants, Susan, Deborah et Ronnie -, elle était profondément impliquée dans le monde des concours hippiques d'Atlanta. Les écuries Radcliffe abritaient quelques-uns des plus beaux chevaux de la région. Pat, qui vivait avec ses parents, enseignait l'équitation à une clientèle distinguée, et ses deux filles avaient remporté de nombreux prix.

Tom Allanson avait travaillé avec eux et leur avait vendu de la nourriture pour chevaux lorsqu'il était employé chez Ralston Purina. Fils d'un avocat, il s'était destiné un temps à devenir vétérinaire. C'était un ami de la famille de Pat, sans plus, mais toutes les femmes qui le voyaient travailler torse nu, ses muscles luisant de sueur, ne pouvaient que le remarquer. Rien de plus facile pour lui que de ferrer, les champions de l'écurie Radcliffe, de puissants chevaux Morgan, en soulevant leurs pieds au creux de la main, comme s'il s'agissait d'agneaux.

À l'automne 1973, une suite d'événements permit à Tom et à Pat de se rapprocher. Elle était libre de tout engagement ; alors que lui, en plein divorce d'avec sa deuxième femme, cherchait un endroit où passer quelque temps. Les Radcliffe, qui disposaient de toute la place voulue dans leur ranch de Tell Road à East Point, au sud d'Atlanta, l'y invitèrent. Il pouvait dormir sur le canapé du bureau contre de petits services auprès de leurs chevaux.

Aux yeux d'un pragmatique, leur union tombait à pic ; aux yeux d'un romantique, elle était inéluctable. Quoi qu'il en soit, Tom Allanson et Pat Taylor passèrent bientôt tout leur temps libre ensemble. Il aimait tout en elle, qui ne cessait de le surprendre. Pourtant, il ne savait à peu près rien de sa vie avant leur rencontre et s'en moquait. De son côté, elle était au contraire d'une insatiable curiosité et l'interrogeait sans cesse sur sa famille et sur les femmes qu'il avait aimées avant elle.

Bien qu'il soit encore marié, ce fut pour eux une période d'un romantisme extraordinaire. Tom n'en revenait pas : non seulement il avait eu la chance de rencontrer Pat, mais en plus elle lui rendait son amour ! Il ne craignait qu'une chose : la perdre à cause de sa mauvaise santé. Ainsi, lorsqu'elle fut hospitalisée à la suite d'un de ses évanouissements, il ne put quitter son chevet tant il se désolait, tenant sa petite main pâle dans sa large paume. Chaque fois qu'elle se réveillait, elle trouvait une rose sur son oreiller et Tom auprès d'elle, qui la contemplait les yeux pleins de larmes.

Elle n'en essaya pas moins de le décourager, le prévenant qu'elle n'était pas faite pour lui, qu'il méritait une « femme complète », l'implorant de considérer la vérité en face.

— Ce n'est pas moi qu'il te faut, sanglotait-elle. Je ne pourrai jamais te donner d'enfant... j'ai subi une hystérectomie. Je ne suis plus qu'une vieille femme qui porte une cicatrice au ventre. Personne ne peut vouloir de moi.

Il ne l'en aimait que davantage. Il ne voulait pas d'autres enfants ; avec elle, ils élèveraient les deux qu'il avait eus d'un précédent mariage et, bien sûr, son fils à elle, Ronnie, encore adolescent.

Pat et sa famille représentaient désormais tout pour Tom. Ils lui avaient donné un toit et l'amour, alors que personne ne voulait de lui. La mère de Pat, Maggy, était la femme la plus gentille qu'il ait jamais rencontrée ; elle aurait fait n'importe quoi pour aider ses enfants et ses petits-enfants. De même, il respectait le colonel pour sa belle carrière militaire. Il finit par implorer Pat de l'épouser dès que son divorce serait prononcé.

Pat ne pouvait supporter aucune pression, pas plus que les dissensions ou les déceptions. Lorsqu'elle confia ses plus chers désirs à Tom, il se rendit compte qu'elle n'en demandait pas trop, mais qu'en revanche elle y tenait beaucoup. Alors il promit de lui offrir une vie si heureuse et si paisible qu'elle recouvrerait la santé.
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