Archimède joue en sa faveur, une bonne partie du corps de Camille est hors de lʼeau, sa tête aussi, elle peut respirer, mais les mains liées la déséquilibrent et elle se retrouve sur le côté, la moitié du visage immergé, cela devient de plus en plus compliqué dʼaspirer des bouffées dʼair glacé qui lui brûlent la cloison nasale de la seule narine disponible. Le bateau sʼéloigne avec les réponses aux questions que Camille aurait encore à poser, dont celles-ci : pourquoi ne lʼa-t-il pas mise dans un sac ? Voulait-il lui laisser une chance ?
Enfin, la dernière avant quʼelle ne sʼévanouisse, comme une pensée inutile et triste : comment dit-on « au secours » en suédois ?
Elle ne veut pas de ces objets et pourtant ils sont là, inertes mais encore tout vibrants de ce qui les a portés. Ils sont immobiles et bien sages, c’est étrange car ils hébergent ce soir plus de fureur et de bruit que s’ils avaient été violemment balancés contre sa porte, depuis la fenêtre ouverte d’une voiture en pleine course, pneus qui auraient agressé le bitume de crissements suraigus. Jeanne ne s’est jamais trop intéressée à la physique quantique mais, ce soir, il lui semble bien que, oui, tout est énergie.
Sauf elle.
Qu’est-ce qui fait qu’un objet est un cadeau ? Le fait de l’offrir ou de l’accepter ?
(...)
Il n’y a plus de cadeaux.
Il reste des objets, mais qui ne sont pas encore des déchets. Comme tous les autres objets contenus dans le sac, ils sont en transit, porteurs d’un message.
Ils sont signes.