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Critiques de Antonio Gamoneda (1)
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Blues castillan

 

 

Écrit entre 1961 et 1966, ce recueil

s'inspire du rythme des chants noirs

américains et exprime une douleur

de vivre.



Blues castillan est en rapport avec

une certaine manière de penser le

monde. Il comporte le récit de faits

devant lesquels , " la souffrance

est une affaire naturelle ."



Ce livre est dominé par deux forces

poétiques, mal connues, à peine pres-

senties et élaborées à partir de l'ignorance

de l'auteur.



Ces deux forces étaient le poète turc

Nazim Hikmet et les paroles des chants

nord-américains à l'origine du jazz :

le blues et le spiritual.



Toutes les traductions sont de Jacques Ancet .





Ainsi



"" I

EN FREDONNANT NAZIM

J'ai là des bruits dans la nuque, docteur.

Je sens mon crâne se serrer, craquer,

surtout si j'ai des peines. Je ne sais…

Il y a sept ans, docteur,

qu'à la place de pensée j'ai un bruit,

une pâte très triste dans la tête.



Je ferai ce que vous direz ; j'aurai

de la patience et confiance. Sans doute.

Je prendrai mes médicaments

pour pouvoir penser à tous mes amis.



Pourtant s'il se trouve, docteur,

que j'ai en moi un mal qui m'est venu

à cause de l'amour,

à cause de l'esprit de résistance,

alors laissez tomber ; il ne s'agit

de rien d'autre que de notre son normal.

Je vivrai

bien mieux avec tout ce bruit dans la tête.

p.27





"" I

GÉOLOGIE

Parfois je pars vers les montagnes

pour regarder au loin.



Je marche sur des coteaux où la vieille terre

se fait belle au soleil et je vois

monter l’ombre sur les collines.

                         Et j’avance

très longtemps en silence.



Mais il y a des jours où je marche sur ces coteaux,

je regarde vers les montagnes,

et même là, pas de liberté.



Et je rentre. Je sais bien qu’il est inutile

de la chercher comme une clé perdue,

et qu’il est tout aussi inutile

de regarder dans le fond de mon cœur.

p.49





" II

BLUES POUR CHRÉTIENS



Ici pas d'autre majesté que la douleur.

Oui, mon ami, il n'est rien d'autre sur la terre.

p.61





" II

BLUES DU CIMETIÈRE

Je connais un village — je ne l'oublierai pas —

qui a un cimetière bien trop grand.

Il est dans mon pays un village en détresse

parce que son cimetière est bien trop grand.

Il n'y a que quarante âmes au village.

Je ne sais pourquoi pareil cimetière.



Un jour les gens se sont mis à partir

presque partout il ne restait personne.

Lorsque les gens se sont mis à partir

presque partout il ne restait personne.

Ils emportaient leurs enfants et leurs lits.

Et ils devaient tuer les animaux.



Il n'y a plus de portes au cimetière,

et les poules peuvent entrer et sortir.

Il n'y a plus de portes au cimetière

et les orties sortent sur le chemin.

On dirait que le cimetière sort

dans les jardins et dans les rues désertes.



Je connais un village. Je ne l'oublierai pas.

Ah, dans la détresse de mon pays,

je n'oublierai pas mon village.



Mauvaise chose que d'avoir fait

un cimetière bien trop grand !

p.63-65





" II

BLUES DE LA MAISON

Dans ma maison ils sont vides les murs

et je souffre en voyant la chaux si froide.

Ma maison a des portes et des fenêtres :

je ne peux supporter autant de trous.



Ici vit ma mère avec ses lunettes.

Ici vit ma femme avec ses cheveux.

Ici vivent mes filles avec leurs yeux.

Pourquoi souffrir en regardant les murs ?



Le monde est grand. Et dans ma maison

il ne tiendra jamais. Le monde est grand.

Et dans une maison — le monde est grand —

qu'il y ait tant de souffrance ça n'est pas bon.

p.71





" III

HIVER

La neige craque comme du pain chaud

et la lumière est pure comme le regard de certains

                                 [êtres humains,

et je pense au pain et aux regards

tandis que je marche sur la neige.



Aujourd'hui c'est dimanche et il me semble

que le matin n'existe pas uniquement sur la terre

mais qu'il est entré doucement dans ma vie.



Je vois la rivière comme un acier obscur

descendre parmi a neige.

Je vois l'aubépine : flamber le rouge,

l'aigre fruit de janvier.

Et les chênes, sur la terre brûlée,

résister en silence.



Aujourd'hui dimanche, la terre est semblable

à la beauté, à la nécessité

de ce que j'aime le plus.

p.85

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