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EAN : 9782714308405
130 pages
José Corti (31/01/2004)
3.25/5   2 notes
Résumé :
J’ai écrit Blues castillan entre 1961 et 1966. Il a été publié tardivement et peu distribué. Il est passé presque inaperçu.
Blues castillan a à voir avec une certaine manière de penser le monde (“nous traversions les croyances” allais-je dire des années plus tard), et, surtout, avec la volonté de transformer en poèmes des événements et des états d’âme qui ont dominé ma vie pendant trente ans. Il comporte le récit de faits devant lesquels — ou dans lesque... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
 
 
Écrit entre 1961 et 1966, ce recueil
s'inspire du rythme des chants noirs
américains et exprime une douleur
de vivre.

Blues castillan est en rapport avec
une certaine manière de penser le
monde. Il comporte le récit de faits
devant lesquels , " la souffrance
est une affaire naturelle ."

Ce livre est dominé par deux forces
poétiques, mal connues, à peine pres-
senties et élaborées à partir de l'ignorance
de l'auteur.

Ces deux forces étaient le poète turc
Nazim Hikmet et les paroles des chants
nord-américains à l'origine du jazz :
le blues et le spiritual.

Toutes les traductions sont de Jacques Ancet .


Ainsi

"" I
EN FREDONNANT NAZIM
J'ai là des bruits dans la nuque, docteur.
Je sens mon crâne se serrer, craquer,
surtout si j'ai des peines. Je ne sais…
Il y a sept ans, docteur,
qu'à la place de pensée j'ai un bruit,
une pâte très triste dans la tête.

Je ferai ce que vous direz ; j'aurai
de la patience et confiance. Sans doute.
Je prendrai mes médicaments
pour pouvoir penser à tous mes amis.

Pourtant s'il se trouve, docteur,
que j'ai en moi un mal qui m'est venu
à cause de l'amour,
à cause de l'esprit de résistance,
alors laissez tomber ; il ne s'agit
de rien d'autre que de notre son normal.
Je vivrai
bien mieux avec tout ce bruit dans la tête.
p.27


"" I
GÉOLOGIE
Parfois je pars vers les montagnes
pour regarder au loin.

Je marche sur des coteaux où la vieille terre
se fait belle au soleil et je vois
monter l'ombre sur les collines.
                         Et j'avance
très longtemps en silence.

Mais il y a des jours où je marche sur ces coteaux,
je regarde vers les montagnes,
et même là, pas de liberté.

Et je rentre. Je sais bien qu'il est inutile
de la chercher comme une clé perdue,
et qu'il est tout aussi inutile
de regarder dans le fond de mon coeur.
p.49


" II
BLUES POUR CHRÉTIENS

Ici pas d'autre majesté que la douleur.
Oui, mon ami, il n'est rien d'autre sur la terre.
p.61


" II
BLUES DU CIMETIÈRE
Je connais un village — je ne l'oublierai pas —
qui a un cimetière bien trop grand.
Il est dans mon pays un village en détresse
parce que son cimetière est bien trop grand.
Il n'y a que quarante âmes au village.
Je ne sais pourquoi pareil cimetière.

Un jour les gens se sont mis à partir
presque partout il ne restait personne.
Lorsque les gens se sont mis à partir
presque partout il ne restait personne.
Ils emportaient leurs enfants et leurs lits.
Et ils devaient tuer les animaux.

Il n'y a plus de portes au cimetière,
et les poules peuvent entrer et sortir.
Il n'y a plus de portes au cimetière
et les orties sortent sur le chemin.
On dirait que le cimetière sort
dans les jardins et dans les rues désertes.

Je connais un village. Je ne l'oublierai pas.
Ah, dans la détresse de mon pays,
je n'oublierai pas mon village.

Mauvaise chose que d'avoir fait
un cimetière bien trop grand !
p.63-65


" II
BLUES DE LA MAISON
Dans ma maison ils sont vides les murs
et je souffre en voyant la chaux si froide.
Ma maison a des portes et des fenêtres :
je ne peux supporter autant de trous.

Ici vit ma mère avec ses lunettes.
Ici vit ma femme avec ses cheveux.
Ici vivent mes filles avec leurs yeux.
Pourquoi souffrir en regardant les murs ?

Le monde est grand. Et dans ma maison
il ne tiendra jamais. le monde est grand.
Et dans une maison — le monde est grand —
qu'il y ait tant de souffrance ça n'est pas bon.
p.71


" III
HIVER
La neige craque comme du pain chaud
et la lumière est pure comme le regard de certains
                                 [êtres humains,
et je pense au pain et aux regards
tandis que je marche sur la neige.

Aujourd'hui c'est dimanche et il me semble
que le matin n'existe pas uniquement sur la terre
mais qu'il est entré doucement dans ma vie.

Je vois la rivière comme un acier obscur
descendre parmi a neige.
Je vois l'aubépine : flamber le rouge,
l'aigre fruit de janvier.
Et les chênes, sur la terre brûlée,
résister en silence.

Aujourd'hui dimanche, la terre est semblable
à la beauté, à la nécessité
de ce que j'aime le plus.
p.85
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
HIVER

La neige craque comme du pain chaud

et la lumière est pure comme le regard de certains êtres humains

et je pense au pain et aux regards

tandis que je marche sur la neige.

Aujourd’hui c’est dimanche et il me semble

que le matin n’existe pas uniquement sur la terre

mais qu’il est entré doucement dans ma vie.

Je vois la rivière comme un acier obscur

descendre parmi la neige.

Je vois l’aubépine : flamber le rouge,

l’aigre fruit de janvier.

Et les chênes, sur la terre brûlée,

résister en silence.

Aujourd’hui, dimanche, la terre est semblable

à la beauté, à la nécessité

de ce que j’aime le plus.
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III
JE PARLE AVEC MA MERE


Maman : tu es maintenant silencieuse
comme l'habit de qui nous a quittés.
Je fixe le bord blanc de tes paupières
et je ne peux penser.

Maman : je veux tout oublier
au fond d'une respiration qui chante.
Passe-moi tes grandes mains sur la nuque
tous les jours pour que ne revienne pas
la solitude.

Je sais que sur chaque visage on voit le monde.
Ne va plus chercher sur les murs, maman.
Regarde le visage que tu aimes :
dans chaque visage humain, mon visage.

J'ai senti tes mains.
Perdu au fond des êtres humains je t'ai sentie
comme tu sentais mes mains avant ma naissance.

Maman, ne recommence plus à me cacher la terre.
Telle est ma condition.
                  Et mon espoir.


p.81
//traduction de Jacques Ancet
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Les spirituals (chanson religieuse) et les blues (évidence profane) ont une double fonction, qui s'ajoute à leur fonction esthétique : exprimer la souffrance et s'en consoler.
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II
BLUES DU COMPTOIR
Il est venu le papier dans les mains
Il m’a fixé de ses yeux fatigués.
il est venu avec papiers et mains
et j’ai senti son regard dans ma vie.

S'il vient un autre jour avec ses mains
et son papier me fixer en silence,
j'espère savoir pourquoi il me fixe
pourquoi il est vieux, grand et pourquoi pèsent
au fond de mon cœur ces yeux fatigués.


p.73
//traduction de Jacques Ancet
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II
BLUES DE L'ESCALIER


Une femme monte dans l'escalier
elle a un chaudron plein de peines.
Une femme monte dans l'escalier
elle porte le chaudron des peines.

J'ai rencontré dans l'escalier la femme
et devant moi elle a baissé les yeux.
J'ai rencontré la femme et son chaudron.

Je n'aurai plus la paix dans l'escalier.


p.77
//traduction de Jacques Ancet
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Papillon de mai - Description du mensonge (Antonio Gamoneda) texte © Antonio Gamoneda, tous droits réservés musique, instruments, voix, mise en images © Franklin Hamon, tous droits réservés
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