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Citation de The_Noir


Peu à peu, l'usure de la guerre, le paysage toujours pareil, de sable et de maigres bosquets, les longs mois tristes de crachin qui jaunissaient le ciel et la nuit d'un même iode que celui des daguerréotypes déteints, tout cela nous avait transformés en des sortes d'insectes indifférents, mécanisés pour un quotidien fait d'attente sans espoir, assis de longs après-midi de suite sur les chaises en planches de tonneaux ou sur les marches de l'ancien poste d'administration en train de fixer du regard les calendriers excessivement lents où les mois s'attardaient avec une lenteur affolante et les jours bissextiles, pleins d'heures, enflaient, immobiles, autour de nous, comme de grands ventres pourris qui nous emprisonnaient sans salut possible. Nous étions des poissons, vous comprenez, des poissons muets dans des aquariums de toile et de métal, simultanément féroces et doux, entraînés à mourir sans protester, à nous coucher sans protester dans les cercueils de l'armée, où l'on nous enfermerait au chalumeau, et où on nous couvrirait du
drapeau national pour nous renvoyer en Europe dans les cales des bateaux, la médaille d'identification dans la bouche pour nous empêcher d'avoir la velléité du moindre cri de révolte.
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